vendredi 30 novembre 2012

Goma : le M23 fait tout pour se rendre populaire

(Agence Syfia 30/11/2012)
Fatiguée des conflits incessants, la population de Goma a accueilli plutôt avec soulagement l'entrée du M23 dans leur ville. Dès les premiers jours, le mouvement a tout fait pour asseoir sa popularité, en particulier celles des jeunes, tandis que la complicité de certaines autorités avec le mouvement rebelle en étonne plus d'un.

Pas de casse, pas d'attaques contre les civils, ni même contre les policiers et les militaires, s'est étonné un étudiant en sciences politiques qui, comme de nombreux habitants de Goma, a été surpris de voir que le M23 qui entrait dans leur ville le 20 novembre, s'y comportait comme s'il était un gouvernement légitime. Lors de sa première intervention sur les antennes de la RTNC, la chaîne de l’Etat, Vianney Kazarama, le porte-parole militaire du mouvement, a rassuré la population : "Nous venons pour la protection des personnes et de leurs biens". Dans ce même message, le lieutenant colonel rebelle a appelé tous les militaires et policiers se cachant à Goma et dans les environs à venir le lendemain au stade Les volcans pour s’identifier.
Curieuse, la population de Goma est venue en foule à cette parade militaire pour voir d’eux-mêmes, les nouveaux maitres de la ville. Leurs avis sont partagés sur la présence du M23. Ceux qui le soutiennent, accompagnent le discours de gestes et d'acclamations, d'autres, la peur au ventre, ne disent mot. "Voulez- vous que le M23 avance ou qu’il se limite ici ?", demande Vianney Kazarama. La majorité des jeunes désœuvrés l'ont acclamé demandant "que la guerre continue jusqu’à Kinshasa !". Devant les journalistes locaux et internationaux, le M23 qui revendiquait jusqu'alors seulement le respect des accords du 23 mars 2009, s’est ainsi senti légitimé.

Promesses
Après s’être assuré de sa popularité au stade auprès de la jeunesse (qui pense avoir des postes dans le probable gouvernement du M23, une fois renversé Kabila, même par voie de négociations), le M23 a lancé ses cadres sur le terrain. Pendant que Beltrin Bisimwa, chef du département de la Communication, réunit les journalistes dans la grande salle de la Croix Rouge, afin de leur montrer la ligne de conduite, le chef du département adjoint de la jeunesse, Joël Malembe, ancien étudiant à l’Université officielle de Goma, quant à lui, invite ses amis à le rejoindre dans le M23 : "Venez chers jeunes car le M23 constitue une offre pour la jeunesse à laquelle les critères d'années d’expérience faites ne sont pas demandées". Gwanzu Jean, gradué en agronomie, déclare ainsi, en rigolant, avoir déposé sa demande pour le poste du directeur général de l’OFIDA (Office des douanes et accises).
Lors de son premier contact avec la population, le porte-parole, l'a rassurée en swahili, disant qu'ils vont mettre fin aux nombreux vols dans la ville de Goma. Depuis une semaine, de fait, on n'entend plus les balles tirées habituellement lors de la chasse aux bandits à mains armées. Même les enfants de la rue ne ravissent plus les affaires des passants car ils ont peur du M23 qui sanctionne ces vols d'une balle dans la tête. "Vous êtes tous les fils du pays, venez vous identifier et chacun regagne son poste. Vous n’avez commis aucune faute, la faute appartient à Kabila qui n'a pas bien payé les soldats", a-t-il dit aussi aux militaires et aux policiers.

Mascarades
Cet accueil d'une partie des habitants semble renforcer le M23 dans le bien fondé de son soulèvement. "Nous n’avions pas l’envie de continuer la guerre, c’est la population qui nous l’a demandé", a déclaré Beltrin Bisimwa, le porte parole du mouvement. Dans son point de presse dès son retour de Kampala, où il a rencontré Joseph Kabila le 24 novembre, Jean Marie Runiga, président du M23, a répondu à la question de savoir qui est derrière son mouvement, en disant que leur premier partenaire c’est Kabila et les FADRC (l'armée congolaise), qui les ravitaillent en armes et minutions. Faisant ici allusion aux mille tonnes d’armes qui ont été abandonnées par les FARDC avant la chute de Goma.
Dans la plupart des cas, lorsqu’une ville tombe entre les mains d’une nouvelle force, les cadres qui ont servi le pouvoir adverse ne sont pas les bienvenus, mais ce n'est pas le cas cette fois-ci, s'est aussi étonné un journaliste. Une situation qui pousse les habitants à penser que ces guerres sont des mascarades entre des frères qui se connaissent bien. Le vice maire, le commandant de la police de la ville de Goma, même le secrétaire général de la majorité présidentielle et autres cadres du PPRD, parti de Joseph Kabila, se retrouvent en effet dans les rangs du M23.


Cosmas Mungazi, Mustapha Mulonda


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