(Le Potentiel
11/01/2013)
Les pourparlers entre la délégation gouvernementale et celle
du M23 à Kampala piétinent.
Le rythme est d’un pas en avant et de deux en
arrière. Ponctué de temps en temps par des contradictions de part et de d’autre.
C’est dans ce contexte, d’une accalmie volatile, que l’Union africaine (UA)
annonce le déploiement imminent d’une Force internationale neutre en RDC.
Chapeau bas ! Mais là où le bât blesse, c’est lorsque des sites à l’intérieur de
la RDC sont prévus pour ce déploiement au détriment de la frontière commune
entre les deux voisins en conflit. De quoi dire que le plan B de la
balkanisation est en marche.
Le déploiement de la Force neutre
internationale dans la partie Est de la République démocratique du Congo ne
serait plus qu’une question de jours, l’Union africaine ayant levé l’option tout
en définissant le format que devait revêtir cette force.
Malgré les
réticences du Rwanda, c’est sous le mandat de la Mission des Nations unies pour
la stabilisation du Congo (Monusco) que devra être placée cette force, avec un
commandement tanzanien.
Une réunion ministérielle de l'Union africaine
s'est tenue cette semaine à Addis-Abeba pour discuter du déploiement de cette
force.
La réunion, à laquelle ont pris part le commissaire de l'UA à la paix et
à la sécurité, Ramtane Lamamara et les ministres des Affaires étrangères de
plusieurs pays de la région des Grands Lacs, dont celui de la RDC, ainsi que les
représentants de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), de
la Communauté économique des Etats de l'Afrique centrale (CEEAC) et des Nations
unies, a examiné notamment les moyens de la mise en place et du déploiement de
cette force, de même que le renforcement du Mécanisme de vérification
conjoint.
Le général Babacar Gaye, conseiller militaire du secrétaire
général de l'ONU, aurait informé les participants des actions prises pour mettre
en œuvre la résolution 2076 du Conseil de sécurité de l'ONU.
Celle-ci définit le
futur mandat de la MONUSCO à la lumière de la demande des pays africains de
déployer une force neutre dans l'est de la RDC.
FNI entourée par un nuage
épais
Il n’y a donc plus d’équivoque possible. C’est sous le mandat de la
Monusco qu’opérera la Force neutre internationale ; une option rejetée par le
Rwanda, qui ne cache pas son animosité à l’endroit des troupes onusiennes basées
en RDC.
Toutefois, il ressort que le déploiement de la FNI,
quoiqu’accueilli comme un pas vers la stabilité dans Est, ne pourrait résoudre
le problème des tensions récurrentes qui minent depuis plus d’une décennie cette
partie de la RDC. Le langage diverge selon qu’il s’agit des modalités du
déploiement de la FNI ou de la clause de son mandat relative à la neutralisation
des forces négatives dont le M23 et les FDLR.
D’un. Le déploiement le
long de la frontière commune entre le Rwanda et la RDC cède le pas au
déploiement sur des sites ciblés à l’intérieur de la RDC, notamment dans le
Nord-Kivu : Walikale, Masisi, Beni, Lubero, etc. Vu sous cet angle, la FNI
s’apparente de plus en plus à une force d’interposition qu’à une force de
dissuasion destinée à préserver les frontières de la RDC.
De deux. Aucun
schéma de désarmement du M23 n’est clairement présenté. Pour preuve, acceptés
comme interlocuteurs de Kinshasa, les animateurs du M23 pourraient bénéficier
d’une amnistie et être insérés dans les institutions de la République à l’issue
des pourparlers de Kampala.
Comment, dès lors, pourrait-on appliquer, à
leur endroit, la clause de neutralisation ? A la CIRGL et l’UA de répondre à
cette question qui a l’air d’entretenir un flou artistique. Un nuage épais
couvre encore la FNI dans son fond et sa forme.
C’est ici que la
responsabilité de Kinshasa est engagée. Le gouvernement ne sait pas défendre une
position face à cette question d’insécurité dans l’Est du pays. L’impression qui
se dégage d’emblée est celle d’une politique de minimisation du danger. On
adhère à des schémas conçus dans des officines étrangères. On adopte quasiment
aveuglément tout ce qui est présenté comme dans un rapport de force de
colonisateurs à colonisés.
Illustration. Au terme d’une rencontre à Goma
des ministres de la Défense de la CIRGL, le vice-Premier ministre, ministre de
la Défense et Anciens combattants, avait laissé entendre que la FNI devait être
déployée à l’intérieur de la RDC, particulièrement dans quatre points situés à
l’intérieur des frontières du Nord-Kivu. Peut-il aujourd’hui percevoir la portée
de cette déclaration par rapport à l’évolution de la situation ?
Le
risque actuel est que l’enthousiasme affiché par Kinshasa pourrait se révéler
très négatif. Il pourrait conduire à escamoter le vrai problème et surtout à
entretenir une situation de crise latente. L’intangibilité de ses frontières
pourrait s’en ressentir longtemps. Qu’est-ce à dire ?
En acceptant de
déployer la FNI à l’intérieur du territoire congolais et non à la frontière
commune entre la RDC et ses voisins, la communauté internationale, l’UA et la
CIRGL vont légitimer le M23 qui contrôle déjà une bonne partie de la province du
Nord-Kivu.
Le plan B
Depuis la publication des rapports des
experts de l’Onu sur la situation sécuritaire en RDC, tout le monde a compris
que le M23 n’est que le bras exécuteur du duo Kigali-Kampala. Eux-mêmes étant
sous traitants des puissances politico-financières internationales.
Or,
celles-ci ne se sont jamais départies de leur détermination à revoir les
frontières de la région des Grands Lacs héritées de la colonisation. Elles ont
créé des seigneurs de guerre et des groupes armés ; elles ont initié des études
et autres réflexions à travers des centres et universités dans le monde aux fins
de montrer, à ceux qui peuvent encore être crédules, que l’ex-colonie belge est
assez spacieuse et trop riche pour ses habitants et ses dirigeants.
Le
premier plan consistait à créer la déstabilisation de la RDC par des guerres
intestines téléguidées de l’extérieur. Mal en a pris aux balkanisateurs. Le
sursaut national a fait échec à la tentative d’amputation d’une partie du pays.
Le discours développé sur l’existence des Congolais de l’Est (proches du Rwanda)
et de l’Ouest (très éloignés) n’a pas porté, le patriotisme et le nationalisme
constituant ce ciment en dur que rien ni personne ne peut ébranler.
La
prise de conscience dans la communauté internationale sur le drame qui prévaut
en RDC a valu à cette dernière une sorte de trêve. Mais puisqu’ils ont la peau
dure, les balkanisateurs ne sont prêts à lâcher prise. Ils épient la moindre
opportunité pour reprendre leur combat et ils ne lésinent pas sur les
moyens.
Autant ils ont infiltré les institutions internationales,
continentales et régionales, autant ils sont présents dans les institutions
nationales. Ils initient des prises de position, découragent ou incitent, s’il
le faut. Dans le cas d’espèce, ils n’ont aucun intérêt à laisser tomber le M23,
leur pion. Ils ont besoin de sa survie afin que leur plan se poursuive, quelle
que soit la direction que pourrait prendre le vent.
La trouvaille ici,
c’est le déploiement de la FNI décidée par l’UA. Ils en ont subtilement déformé
les modalités de mise en œuvre de même que son mandat. Leur politique repose sur
l’usure. Ils veulent que les Congolais se lassent d’être en guerre et finissent
par se dire : « nous ne nous en sortirons jamais, lâchons du lest et on nous
fichera la paix ! ». Mon œil ! Cela n’arrivera pas. L’éveil national est à son
comble.
La population congolaise sait que le Rwanda veut rattacher le
Nord-Kivu à son territoire afin de tirer meilleur parti de toutes les richesses
dont regorge cette partie du pays. Elle sait aussi qu’en écartant la
neutralisation du M23 dans le mandat confié à la Force neutre internationale, la
voie est ouverte vers la consolidation des positions du M23 et donc, de
poursuite de la tension en y donnant des coups de pinceaux aux couleurs
nationales.
Tout compte fait, l’efficacité de la CIRGL, de l’UA et de
l’ONU à travailler réellement pour un retour rapide et durable de la paix dans
l’Est du territoire national est mise à dure épreuve. Leurs pistes de solution
remettent en cause la souveraineté de la RDC. Car tel qu’il est préparé, le
déploiement de la Force neutre internationale pourrait à terme permettre aux
balkanisateurs d’obtenir de la manière la plus douce ce qu’ils recherchent
depuis deux décennies. Mais sur le plan national, le Plan B : échec et mat
!
Publié le vendredi 11 janvier 2013 00:25
Écrit par Le Potentiel
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