vendredi 21 septembre 2012

Témoignage de NDELE ALBERT sur l'assassinat de LUMUMBA

lumumba

NDELE ALBERT

Présentation du témoin

Au moment de l’assassinat de Lumumba, Albert Ndele était commissaire aux Finances et vice-président du Collège des commissaires (septembre 1960 – février 1961). Il était co-responsable du transfert de Lumumba. Au sein du gouvernement Lumumba, il était chef de cabinet du ministre des Finances.1. Pourquoi Mobutu était-il hésitant au sujet de l’arrestation de Lumumba ? 2. Le Collège des commissaires s’est fixé pour objectif de neutraliser les hommes politiques congolais jusqu’au 31 décembre 1960 et de tenir Lumumba à l’écart du pouvoir politique. Le Collège a-t-il jamais, selon Ndele, envisagé l’élimination physique de Lumumba ? Quels personnages importants à Léopoldville ont insisté afin que Lumumba soit transféré au Katanga, sachant que ce transfert pouvait signifier sa mort ? Selon le témoin, la« condamnation à mort » de Lumumba était-elle uniquement une décision de Tshombe et de ses collaborateurs politiques ? 3. Dans quelle mesure Ndele savait-il qu’il avait été fait appel à des militaires belges (Dedeken, Marlière) pour la préparation de scénarios possibles d’enlèvement de Lumumba ? 4. Dans quelle mesure le témoin faisait-il appel, en tant que vice-président du Collège des commissaires, à des conseillers belges ou à des Belges qu’il connaissait du temps où il étudiait en Belgique ? 5. Qui exerçait le pouvoir au Congo après la destitution de Lumumba : les commissaires ou le gouvernement Ileo ? La reconnaissance officielle du collège par les Nations unies et l’amélioration des relations avec l’ANC (cf. télex Dupret à Belext, Brazza 606, 4/10/60, deuxième phase, IIe partie) ont-elles induit un changement en la matière ? 6. Pourquoi le témoin était-il un opposant à Lumumba ? 7. Qui a imaginé le plan en vue de la destitution de Lumumba ? Quel a été le rôle de Ndele dans cette entreprise ? 8. Ndele a-t-il reçu de l’argent de la Belgique ou d’autres pays ? 9. Quel type de relations entretenait-il avec Benoît Verhaegen ? 10. Ndele a assisté à une rencontre avec le ministre Scheyven à Genève. Quel en était l’objet ? A-t-il reçu de l’argent ? 11. Ndele a été la cible d’un attentat. Craignait-il la terreur de Lumumba et de ses partisans ?12. Quel a été le rôle de Nkayi (ministre des Finances dont Ndele était le chef de cabinet) dans la destitution de Lumumba ? 13. Bomboko a plaidé en faveur d’un transfert de Lumumba dès le 20 décembre. Quelle a été l’attitude de Ndele ? Quel sort voyait-il réservé à Lumumba après son transfert à Élisabethville ?

Témoignage

Albert Ndele a été entendu par la commission d’enquête le 25 juin 2001. Le témoin ne se souvient pas que la réunion à Genève avec le ministre Scheyven ait porté sur des questions autres que techniques. Aucune question politique, même générale, n’a été abordée. Concernant l’attentat perpétré à son encontre, en octobre, Ndele n’a pas d’idée sur l’identité de ceux qui ont pu le commettre. Tous les commissaires généraux, dont Ndele, avaient conscience à l’époque qu’il pouvaient être la cible d’attaques, mais leurs craintes étaient davantage suscitées par la situation générale de désordre au Congo que par leur opposition à une personne déterminée. De nombreux groupes, les « jeunesses » (« jeunesses lumumbistes », « jeunesses mulélistes », « jeunesses Baluba », « jeunesses du Kasaï »), étaient actifs, et dans la situation de « congolisation », de désordre total d’alors, il était difficile aux commissaires d’identifier qui était avec eux et qui était contre eux. Le collège des commissaires, dont Ndele était viceprésident, n’avait pour mission, selon le témoin, que de faire fonctionner l’administration, « en attendant que les politiciens se réconcilient ». Le témoin n’a pas souvenir que des discussions sur le sort de Lumumba aient eu lieu en sa présence. Il est très possible que le ministre des Finances ait organisé ce type de réunions, mais Ndele n’en a pas connaissance. Bomboko, président du collège n’aurait quant à lui jamais parlé à Ndele de Lumumba. Lorsque « le problème de Lumumba s’est aggravé », à partir des mois de décembre ou janvier, Ndele n’était pas au Congo, mais en Belgique, pour raisons de santé (de début décembre 1960 à fin janvier-début février 1961). Ndele n’a donc jamais participé à d’éventuelles discussions du collège des commissaires sur le sort de Lumumba. Le témoin, qui n’a jamais eu personnellement à se plaindre du concours des Belges, n’a jamais entendu parler, lorsqu’il était commissaire général, de tentatives belges pour éliminer Lumumba, que ce soit politiquement ou physiquement. Il n’a par ailleurs jamais constaté à l’époque de dons en argent de Belges à certaines personnes pour acheter leur influence, même s’il n’exclut pas formellement que cela ait pu exister.Ndele, qui connaissait Lumumba depuis ses études à l’université de Lovanium, n’avait quant à lui aucune appréciation sur son gouvernement ou sur sa gestion en tant que premier ministre. Il aurait de tout façon été difficile de se faire une idée générale sur ce qu’il était capable de faire ou de ne pas faire, étant donné qu’il n’a pas été longtemps au pouvoir. Il n’a pas non plus été personnellement approché, ni au Congo ni à l’extérieur, relativement au sort à réserver à Lumumba, et n’a jamais été au courant d’une « combine » visant à liquider Lumumba. Concernant les documents, télex et rapports citant Ndele, celui-ci dément avoir été mêlé, de près ou de loin, aux « histoires du gouvernement ». L’utilisation de son nom découlerait de la volonté de certains d’utiliser le nom de personnes déterminées pour « confirmer leurs propres pensées ».Ndele ne disposait d’ailleurs pas, selon ses dires, des« moyens de stopper » Lumumba. Les discussions du « groupe de Binza », qui comprenait notamment Mobutu, Nendaka, Bomboko et Kandolo, tournaient autour de problèmes concernant l’organisation administrative du pays. Ce groupe n’aurait donc jamais envisagé la démission de Lumumba. Le témoin, chef de cabinet du Ministre des Finances Nkayi, n’a jamais vu ce dernier faire autre chose que remplir correctement ses fonctions ministérielles. Les conversations que Ndele a pu avoir avec Nkayi tournaient autour de sujets techniques, jamais politiques. Le témoin ne sait pas du tout quelles relations autres que celles entretenues dans le cadre de ses fonctions ministérielles Nkayi aurait pu avoir. En ce qui concerne le paiement des troupes congolaises, celles-ci n’étaient pas payées, ou étaient payées « avec ce que le ministère des Finances avait ».Ndele, faisant partie du cabinet et non des services du Ministère, n’est pas au courant d’un ordre d’octroi d’un prêt de cinq cent millions de francs de la Banque du Congo destinés au paiement des fonctionnaires et de l’armée. Il ne sait pas davantage quelle fut la contrepartie pour libérer cette somme. Ndele voyait par ailleurs souvent Verhaegen, qu’il avait eu comme professeur à l’université et avec qui il a gardé d’excellents contacts. Les sujets des discussions avec lui étaient variés et pas nécessairement politiques. Ndele ne se souvient pas de ce que pensait Verhaegen de la politique de Lumumba. Les rapports du témoin avec le président Kasa Vubu étaient étroites, Ndele étant « comme un fils pour lui »,mais si Kasa Vubu le recevait encore lorsqu’il était président, il n’a lui cependant jamais demandé quoi que ce soit, et Ndele n’a jamais traité de questions particulières avec lui.

Données biographiques

Né à Boma, le 15 août 1930 En Afrique : Gouverneur de la Banque nationale Chef de cabinet du ministre des Finances (gouvernement Lumumba) Commissaire général aux Finances Vice-président du Collège des commissaires (septembre 1960 – février 1961) Divers : Membre de la commission préparatoire De Voghel. Porte-parole du Collège exécutif général lors de la Conférence belgo-congolaise sur les problèmes financiers et sociaux (Bruxelles, avril-mai 1960). Membre du groupe de travail constitué par la Conférence (mars-juin 1960). Fut attaqué et gravement blessé par des lumumbistes après une conférence de presse. A plusieurs fois attiré l’attention sur l’état de délabrement des finances congolaises; a réussi, par l’intermédiaire de l’ONU, à obtenir 5 milliards de francs belges à Washington.

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