samedi 5 janvier 2013

RDC: les pourparlers de Kampala s’annoncent tendus

 

Le rebelle congolais Sultani Makenga dans un camion, à Goma, dans l'est de la RDC, le 20 novembre 2012.
Le rebelle congolais Sultani Makenga dans un camion, à Goma, dans l'est de la RDC, le 20 novembre 2012.
REUTERS/James Akena/Files

Par Ursula Soares
Les autorités congolaises et le Mouvement du 23 mars (M23) reprennent les pourparlers à Kampala, en Ouganda, ce vendredi 4 janvier. Les discussions avaient été suspendues le 21 décembre sans que les deux parties aient trouvé un accord, notamment sur la question d’un éventuel cessez-le-feu. Cette fois-ci, le mouvement rebelle semble déterminé à camper sur ses positions, ce qui laisse présager, dans les deux camps, un climat tendu.

Lors de la première séance de négociations, le désaccord entre les deux parties a essentiellement porté sur un possible cessez-le-feu. Le M23 en a fait un préalable alors que le gouvernement a rejeté toute idée sur cette question.

Cette fois-ci, à la veille de la reprise des pourparlers, le M23 maintient sa position. Joint par RFI, Jean-Marie Runiga, responsable politique du M23, précise que son mouvement attend de ces pourparlers la signature du cessez-le-feu avec le gouvernement de Kinshasa. « Si cela n’aboutit pas, il se retirera des discussions », a-t-il ajouté.

Jean-Marie Runiga
Responsable politique du M23
Interviewé par Heridel Ntema/RFI
La première chose que nous allons demander c’est la signature du cessez-le-feu entre le M23 et le gouvernement de Kinshasa.
 
03/01/2013

De son côté, Raymond Tshibanda, ministre des Affaires étrangères de la République démocratique du Congo (RDC) - qui conduit la délégation gouvernementale -, n’a pas souhaité commenter ces propos. Joint par RFI, il a par ailleurs affirmé qu'en s’exprimant hors du cadre des négociations, le M23 « commet une violation des accords encadrant les pourparlers».

Le statut de Goma : un autre point de désaccord
Les premiers pourparlers entre les autorités congolaises et les rebelles du M23 ont commencé le 9 décembre dans la capitale ougandaise. Suspendues avant les fêtes de Noël et du Nouvel An, ces discussions n’ont connu aucune avancée. Celles-ci avaient été promises aux rebelles du M23, à la suite d’une médiation des pays de la région des Grands Lacs, orchestrée par l’Ouganda, en échange de leur retrait de Goma, la capitale du Nord-Kivu, qu’ils avaient prise le 20 novembre et qu’ils ont, par conséquent, quittée le 1er décembre.

D’après les Etats des Grands Lacs, les rebelles devaient se retirer à au moins 20 km au nord de Goma mais, en réalité, ils sont aux portes de la ville. Plusieurs sources affirment qu’ils ont récemment reçu des bataillons « rwandais » pour renforcer leurs rangs, en cas d’échec des pourparlers avec Kinshasa. Des informations que le M23 dément catégoriquement et des accusations que la mission de l’ONU dit, pour sa part, ne pas pouvoir « confirmer ».

Le M23 garde un œil sur Goma – capitale de la riche province minière du Nord-Kivu – d’autant plus que les rebelles veulent absolument administrer cette ville, forte d’un million d’habitants. Sur cette question, les deux parties sont également en total désaccord.

Envoi d’un bataillon tanzanien
C’est dans ce contexte difficile que Ramatane Lamamra, commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine (UA), s’est rendu, mercredi 2 janvier, à Kinshasa pour une visite de deux jours où il a rencontré le ministre des Affaires étrangères, Raymond Tshibanda.

Ce jeudi 3 janvier, depuis Goma, il a annoncé qu’un bataillon tanzanien sera déployé « incessamment » dans l’est de la RDC, et cela dans le cadre de la future force neutre qui doit combattre des groupes armés. « La situation d’insécurité dans l’est de la RDC nous préoccupe tous. Le bataillon tanzanien, dont les officiers arrivent incessamment à Goma, devrait commencer son travail très bientôt », a-t-il déclaré à la presse.

Ramatane Lamamra se rendra dès demain, vendredi, au Rwanda où il discutera avec de hauts responsables des efforts entrepris pour « promouvoir la paix, la sécurité et la stabilité ».

L’incontournable Rwanda
Depuis des années, le Kivu fait l’objet de convoitises et Kinshasa montre du doigt le Rwanda. Ce dernier est accusé d’être derrière les rébellions qui se succèdent dans la région depuis plus d’une dizaine d’années. C’est valable aussi pour le M23. Plusieurs rapports d’experts travaillant pour les Nations unies font état d’un soutien militaire direct du Rwanda. Des accusations toujours réfutées par Kigali.

Parfois, le gouvernement congolais lui-même dénonce clairement son voisin mais parfois aussi, il le ménage. Cette hésitation est due au fait que, même s’il est souvent taxé d’être un agresseur, le Rwanda est aussi un acteur incontournable pour ramener la paix dans la région. Pour sa sécurité, ce pays veut mettre fin à l’activité d’un autre groupe armé qui le menace à partir précisément du Congo. Il s’agit notamment des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), issues des milices qui avaient perpétré le génocide de 1994. Entre FDLR et M23, entre RDC et Rwanda, la sécurité de l’un ne va pas sans celle de l’autre. Kinshasa n’a aucun intérêt à se brouiller avec Kigali.

Là encore sur cette question du Rwanda, le ministre congolais des Affaires étrangères, Raymond Tshibanda, a précisé, avant même le début des pourparlers, qu’elle ne serait pas abordée.

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