(Le Nouvel Observateur
12/10/2012)
Y
aller ou pas ? Le président français a longtemps hésité à se rendre au Sommet de
la Francophonie qui s'ouvre aujourd'hui en RDC.
Y aller ? Ne pas y aller
? La question a taraudé François Hollande tout l’été. Il y avait de bonnes
raisons de boycotter le 14e Sommet de la Francophonie qui s'ouvre ce vendredi en
RDC : l’hôte, Joseph Kabila, est un président autoritaire, réélu en 2011 dans
des conditions douteuses, qui multiplie les atteintes aux droits de
l’Homme.
L'Elysée avait aussi sous la main d'autres options : envoyer à
Kinshasa le ministre des Affaires étrangères plutôt que le président, reporter
ou même délocaliser le sommet. D'autant qu'il y avait déjà eu des précédents :
c'est cette dernière solution qui avait été retenue en 1991, lorsque la
conférence prévue dans le Zaïre (ex-RDC) de Mobutu – déjà à l'époque ! – avait
été rapatriée à Paris, puis en 2010, où l'on avait préféré Montreux à
Madagascar.
Cette fois, les convives ont réagi en ordre dispersé. Le
Premier ministre belge, Elio Di Rupo, a trouvé une excuse pour décliner
l'invitation avec la tenue d'élections communales le jour-même du sommet. Le
Canadien Stephen Harper a, en revanche, fait le choix d'y aller. Nicolas Sarkozy
penchait, lui, pour la chaise vide. Son successeur en a finalement décidé
autrement.
Deux versions
Dans la version officielle, ce sont
Yamina Benguigui, sa ministre de la Francophonie envoyée en éclaireur à
Kinshasa, puis Souhayr Belhassen, la présidente de la Fédération internationale
des droits de l’Homme (FIDH), qui l’ont convaincu. Leur argument ? Il se rendra
plus utile en exprimant sur place son soutien aux opposants et à la société
civile qu’en restant à Paris. "J'y rencontrerai l'opposition politique, les
militants associatifs, la société civile. C’est le sens de la nouvelle politique
africaine de la France : tout dire partout et faire en sorte que ce qui soit dit
soit fait", s’est-il ensuite justifié.
Officieusement, tout se serait
joué dans un bras de fer entre Hollande, conditionnant sa venue à des réformes
démocratiques, et Kabila, menaçant d’annuler le sommet et de sortir le plus
grand Etat francophone d’Afrique de l’Organisation internationale de la
francophonie. Une partie que Kabila a manifestement gagnée, même si le sommet
risque d'être houleux.
Trois jours avant de monter dans l'avion, François
Hollande remettait un coup de pression, jugeant "la situation dans ce pays tout
à fait inacceptable sur le plan des droits, de la démocratie, et de la
reconnaissance de l'opposition". La riposte qui a aussitôt fusé du camp
congolais en dit long sur l'état d'esprit à Kinshasa : "Nous sommes le pays le
plus avancé dans les droits de l'opposition", a assuré le porte-parole du
gouvernement, suggérant à François Hollande de "compléter son
information".
Dakar, planche de salut
D’autant plus embarrassé
qu’il s’agit là de sa première visite officielle en Afrique, le président
français a cherché à la contrebalancer par une escale au Sénégal, "modèle de
démocratie sur le continent". Là où son prédécesseur, qui avait lui aussi
accordé au Sénégal son premier déplacement, s’était pris les pieds dans le tapis
avec son tristement célèbre discours de Dakar et sa tirade sur "l'homme africain
(…) pas assez entré dans l’Histoire", François Hollande va chercher au contraire
à partir du bon pied sur le continent. Au programme, un discours devant les
parlementaires sénégalais, évidemment très attendu après celui de Sarkozy, et
une visite sur l'île de Gorée. Avec l'espoir que le souvenir laissé par sa
prestation à Dakar sera plus impérissable que celui de Kinshasa.
Par
Sarah Halifa-Legrand
- Mis à jour le 12-10-2012 à 08h29
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Observateur
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