KongoTimes!
Le président français a dénoncé des "réalités inacceptables" en République Démocratique du Congo (RDC). François Hollande se gardant d'applaudir le discours du Congolais Joseph Kabila : c'est l'une des images fortes de l'ouverture, samedi, du sommet de la Francophonie de Kinshasa. Joseph Kabila a vanté à l'ouverture du sommet "la tolérance, l'Etat de droit et la démocratie (...) consubstantiels de la Francophonie", alors même que ses opposants, interdits de manifestation, avaient appelé à un boycott du sommet pour ne pas légitimer sa réélection contestée en 2011. Joseph Kabila, dont le régime reste sous le feu des critiques pour ses violations des droits de l'homme, a pourtant assuré que la RDC s'était engagée à "traduire ces valeurs universelles dans la vie de ses institutions et de ses populations". Evoquant le conflit dans l'Est du pays, où s'opposent depuis cinq mois armée régulière et soldats mutins, le chef de l'Etat congolais a dénoncé "une guerre injuste" et "imposée" par "des forces négatives à la solde d'intérêts extérieurs", sans toutefois citer le Rwanda voisin, accusé par l'ONU de soutenir militairement la rébellion du M23. "Toute la journée, on a parlé du Rwanda sans jamais vraiment le citer", constatait en soirée une source française.
La Francophonie a défendu samedi les droits de l'homme et la démocratie comme les valeurs communes et constitutives de l'organisation, lors d'un sommet à Kinshasa où le président français n'a pas épargné le pouvoir en place. La rencontre a été dominée par deux crises africaines majeures, l'occupation du Nord-Mali par des islamistes armés et le conflit dans l'Est de la République démocratique du Congo (RDC), aussi bien en public que pendant un débat à huis clos qui se prolongeait en début de soirée.
En marge du sommet de la Francophonie, le président français a dénoncé des "réalités inacceptables" en RD Congo en inaugurant la médiathèque Floribert Chebeya, un militant des droits de l'Homme congolais assassiné en 2010. "Ici, nous sommes dans une démocratie où le processus n'a pas été encore complet, c'est le moins que l'on puisse dire", a insisté M. Hollande.
François Hollande se gardant d'applaudir le discours du Congolais Joseph Kabila : c'est l'une des images fortes de l'ouverture, samedi, du sommet de la Francophonie de Kinshasa, où le président français s'est posé en garant des libertés.
La question des droits de l'homme a constitué le fil rouge de la visite d'une journée du chef de l'Etat dans l'ancien Zaïre, où il a invité les 56 pays du monde francophone à mettre leur langue "au service du monde et de la liberté".
"Je suis venu aussi ici, à Kinshasa, pour parler clair comme je m'y suis engagé à Dakar, c'est-à-dire que je ne change pas de discours selon les lieux ou selon les interlocuteurs", a dit François Hollande lors d'une conférence de presse finale dans la capitale congolaise.
"Je dis non pas ce que je pense mais ce que la France porte comme message, comme principes, comme valeurs", a-t-il ajouté.
Après le Sénégal, la République démocratique du Congo était la deuxième étape d'une tournée africaine de deux jours, la première de son quinquennat, du président français.
A l'ouverture du sommet de la Francophonie, François Hollande a rappelé que "c'est en français que les révolutionnaires de 1789 ont proclamé et donc écrit la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen".
"La francophonie doit porter la démocratie, les droits de l'homme, le pluralisme, le respect de la liberté d'expression, l'affirmation que tout être humain doit pouvoir choisir ses dirigeants", a-t-il dit.
Le Premier ministre canadien, Stephen Harper, a également "Tous les gouvernements sans exception doivent garantir à leurs ressortissants une bonne gouvernance, l'état de droit et le respect des libertés individuelles", a-t-il dit à la tribune du sommet.
Pas d'applaudissements
Tous ces propos ont pris un caractère particulier dans un pays où les journalistes et les militants des droits de l'homme ont du mal à s'exprimer et où les élections de novembre 2011 ont été entachées d'irrégularités.Dans le Palais du peuple, François Hollande s'est gardé d'applaudir les propos liminaires du président congolais Joseph Kabila, qu'il a omis de remercier en tant qu'hôte lorsqu'il a pris la parole.
Les deux hommes avaient eu auparavant un entretien "franc et direct" au palais présidentiel, ce qui n'a pas empêché le président français de réitérer sur le sol congolais ses propos tenus cette semaine à Paris, où il avait qualifié "d'insoutenable" la situation des libertés en RDC, des commentaires fraîchement accueillis à Kinshasa.
"C'est la bataille des droits de l'homme, elle demeure. Ici nous sommes, je l'ai dit, dans une démocratie où le processus n'a pas été encore été complet, c'est le moins que l'on puisse dire. Il y a encore des réalités inacceptables", a-t-il dit après avoir inauguré une plaque en l'honneur du militant des droits de l'homme congolais Floribert Chebeya, assassiné en juin 2010.
Le cas de ce militant, dont les meurtriers n'ont pas été jugés, et de journalistes emprisonnés a été abordé lors de l'entretien avec Joseph Kabila.
Etienne Tshisekedi, chef de l'opposition congolaise qui accuse Joseph Kabila de lui avoir volé la victoire au scrutin de novembre 2011, a été reçu pendant une vingtaine de minutes à la résidence de France par François Hollande. Il a confié aux journalistes avoir trouvé son hôte français "très receptif".
"Les deux hommes ont évoqué les questions intérieures, y compris les droits de l'opposition et des médias et aussi la situation dans l'Est et l'intégrité territoriale du pays", a-t-on indiqué dans l'entourage du chef de l'Etat français.
Arrivé au petit matin en provenance du Sénégal, François Hollande a rencontré à Kinshasa les représentants de sept ONG, et reçu des membres de l'opposition de l'Assemblée nationale congolaise "qui lui ont demandé un renforcement de la démocratie et des libertés en RDC", a rapporté son entourage.
Des élections locales, prévues l'an prochain, serviront de test.
Le Français est une langue africaine
François Hollande et Joseph Kabila ont évoqué la situation dans l'Est de la RDC, où des combats transfrontaliers provoquent d'importants déplacements de population.Réaffirmant dans son discours que "les frontières de la République démocratique du Congo sont intangibles", le président français s'est dit favorable à ce que le mandat de la Monusco (la Mission d'observation des Nations unies en République démocratique du Congo) "puisse être précisé, élargi si nécessaire".
La situation au Mali a aussi été largement abordée entre le président français et ses interlocuteurs, alors que le conseil de sécurité des Nations unies vient de voter une nouvelle résolution préparant une intervention armée panafricaine.
François Hollande a renouvelé le message d'encouragement à l'Afrique délivré la veille dans la capitale du Sénégal.
"Le français est une langue africaine", a-t-il dit sous les applaudissements de l'assemblée. "L'avenir de la francophonie, il est ici, en Afrique (...) Le français n'appartient pas à la France, il vous appartient, il est à vous."
Selon les prévisions, sur les 700 millions d'hommes et de femmes qui parleront le français en 2050, 80% vivront en Afrique.
(avec Afp, Reuters)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire