jeudi 11 octobre 2012

Tueries à Goma, fête à Kinshasa

L'Auteur

jacquesmatand

 

A l’occasion du XIVe sommet de la Francophonie, un méga-concert est organisé ce 10 octobre à Kinshasa, deux jours avant le début officiel du sommet. Alors que les préparatifs pour cette fête qui présentera aux publics la culture congolaise dans ce qu’elle a de Francophone, à Goma, dans le Nord-Kivu, le décompte des morts continue.

Dans la nuit du 9 au 10 octobre, une dame vendeuse de farine a été tuée à Ndosho, quartier à proximité de Goma, province du Nord-Kivu.
«Elle a été abattue par deux hommes armés dans la soirée. Ils sont entrés dans sa maison et l’on fait sortir pour lui loger des balles, sans aucune raison visible», confie un témoin. La veille, une grenade a explosé dans un autre quartier faisant un mort et une quinzaine de blessés.

A Kinshasa, place à la fête en marge du XIVe sommet de la Francophonie. Deux jours avant le lancement du sommet, un méga concert est prévu au village de la Francophonie. Ce 10 octobre, se tient la nuit de la Francophonie, concert géant où les sonorités musicales congolaises vont naviguées entre la musique congolaise urbaine, la rumba et les musiques traditionnelles. Sur la scène prévue au stade des Martyrs, une trentaine d’artistes congolais et africains venus du Sénégal, République Centrafricaine, Tchad, Guinée Conakry, Burundi, Côte d’Ivoire et Congo Brazzaville.
La belle brochette d’artistes congolais semble ne pas faire l’unanimité pour certains qui estiment que «la programmation a failli dans sa sélection. Ils n’ont pris que les musiciens qui font la musique typique de Kinshasa (plus connue sous le nom de Ndombolo ndlr) et ceux qui font la musique traditionnelle. Alors qu’il y a d’autres artistes qui font une musique congolaise qui s’inscrit mieux dans le cadre de la célébration de la langue française, déplore un membre de l’équipe d’organisation.
Splendeur de la culture congolaise
Pour le professeur André-Yoka Lye, président de la Commission culturelle et scientifique de ce sommet, le village de la Francophonie est une occasion de présenter la culture congolaise dans toute sa splendeur et sa diversité. En plus de ce concert, il y aura aussi des randonnées pour les chefs d’états présents au sommet et leurs épouses.
D’après le professeur Ndaywel, commissaire général du sommet de la Francophonie, «il faut cesser de croire que le Congo n’est qu’une succession de crises, de problématiques qui n’en finissent pas, a-t-il déclaré au Potentiel, quotidien paraissant à Kinshasa. Vous allez voir un Congo qui a décidé de se relever, qui va montrer au monde toute sa richesse culturelle, ignorée minimisée et chaque fois mise sous le boisseau, car on ne parle jamais que de la violence de la misère, en omettant les valeurs humaines vécues ici, le sens de la famille de la solidarité qui font que malgré tant de crises et de problèmes, quand on arrive ici on voit des gens heureux, des enfants qui vont à l’école et sourient. Il y a une autre énergie qui n’est pas reprise dans les statistiques, mais qui démontre qu’il existe un autre Congo. Et c’est de Congo là qui veut se faire voir au monde lors de ce sommet».
Situation inacceptable en RDC
Cette grande fête, a tout de même du plomb dans l’aile depuis que François Hollande, président de la France, a estimé que la situation en RD Congo, était inacceptable sur le plan des droits, de la démocratie, et de la reconnaissance de l’opposition. Propos tenues lors d’une conférence de presse le 9 octobre.
Ce qui promet déjà une belle empoignade pendant le sommet. Ce serait visiblement compte tenu de cette situation que le président Français ne passera pas une seule nuit à Kinshasa ou se tient le sommet de la Francophonie. Comme si ce sommet n’avait qu’un intérêt relatif. Avant de se rendre à Kinshasa, François Hollande passera d’abord au Sénégal, un pays qui a fait preuve d’une maturité politique et démocratique, avant d’arriver à Kinshasa pour un programme marathon. Son allocution, très attendue, pendant le sommet, rencontres avec différents acteurs politiques, etc. Ce sera aussi l’occasion pour les opposants congolais de se faire entendre sur leurs revendications: la victoire des urnes pour ceux qui soutiennent bec et ongle la victoire d’Etienne Tshisekedi lors de la dernière présidentielle, le manque de liberté d’expression et les entraves à la démocratie.
Dans ce bourbier, le président de la France est attendu au tournant. Un exercice d’équilibrisme pas facile d’autant plus que c’est le pouvoir actuel, contesté après les irrégularités qui ont entachées la victoire de Joseph Kabila, qui l’invite. L’opposition quant à elle attend une prise de position ferme pour les valeurs que la France défend, la démocratie et le respect des résultats des urnes, sans parler de la rébellion du M23 qui prévaut à l’est du Congo.
Loin de ces considérations politiques, la Francophonie est alors la grande fête à laquelle près de 3000 personnes sont conviés.
Bonne fête pour ceux de Kinshasa, qui certainement seront de cœur avec les attristés de Goma.
Jacques Matand’
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