jeudi 26 juillet 2012

Avec la progression du M23 à Rusthuru : Balkanisation : le projet «Congo Oriental» en marche


(Le Potentiel 26/07/2012)

Le M23, appuyé par le Rwanda, vient de reprendre le contrôle de Rutshuru-centre. Cette progression confirme davantage les vraies intentions de cette guerre de prédation ayant causé la mort de plus de 9 millions de Congolais. Récemment, dans une conférence de presse, le M23 est revenu abondamment sur l’expression «Congo Oriental»,

laquelle est aussi embouchée par des puissances occidentales et des multinationales anglo-saxonnes très intéressées. Ceci pour dire que la coïncidence n’est pas fortuite ; elle fournit la preuve que le projet de balkanisation est toujours en marche et passerait par la création d’un Etat dénommé «Congo Oriental».

Le M23 a repris le contrôle de Rutshuru-centre hier mercredi en fin d’après-midi. Cette progression sur le terrain des affrontements ne peut étonner quand on sait que le mouvement rebelle bénéficie du soutien multiforme des puissances politiques occidentales et des multinationales anglo-saxonnes à travers le régime de Kigali.

D’ores et déjà, dans une conférence de presse tenue à Bunagana le week-end, le porte-parole du M23 donnait des indications claires sur les visées sécessionnistes de l’aventure militaire de son mouvement. A travers un tralala d’argumentaire dont l’opinion n’a que faire, le conférencier s’est dévoilé en prenant des distances vis-à-vis de la terminologie en usage au pays. Il est revenu plusieurs fois sur l’expression «Congo Oriental» pour désigner l’Est de la RDC. Or, c’est cette expression qui est utilisée avec délectation par les initiateurs du démembrement du Congo dans ses frontières héritées de la colonisation. Bien plus, il s’est autorisé d’en faire, subtilement, une délimitation géographique : «le Kivu-Maniema, l’Ituri et les Uélé».

Une autre indication aussi révélatrice, c’est cette appellation de «soleil graben» pour désigner le site Internetdu mouvement rebelle. Tout un message sur le tracé géographique de leurs ambitions sur les terres rares que renferme le territoire choisi, notamment l’or, le diamant, le coltan, mais aussi et surtout le pétrole coule sous le Graben.

Dans sa conclusion, le pasteur-rebelle devient de plus en plus explicite s’agissant du projet de balkanisation de la RDC. Il reprend à son compte les arguments massues brandis par les balkanisateurs pour justifier la création d’un Etat autonome dans l’Est. Qu’ils appellent affectueusement «Congo Oriental». Il soutient qu’à l’heure actuelle, la population congolaise s’élèverait à environ 60 800 000 habitants, soit une densité moyenne de 26 habitants au km², «ce qui n’en fait pas un pays particulièrement peuplé».

Le fait est criant quand il parle de causes du Congo devenu, selon lui, un «Etat-néant» : «Ainsi aujourd’hui, la classe politique congolaise n’est pas en mesure de gérer correctement et efficacement la RDC, dans sa configuration actuelle. L’on constate, en effet, que depuis près d’un demi-siècle, tous ceux de nos leaders qui ont cherché à piloter le char de l’Etat congolais s’y sont cassé les dents. De manière générale, sont en cause, d’une part, l’immaturité politique, l’incompétence professionnelle, les pratiques prédatrices et le manque de patriotisme des gouvernants. D’autre part, l’immensité du pays jointe à une gouvernance centralisée à outrance, c’est-à-dire dans laquelle le peuple n’est jamais consulté sur les choix politiques faits en son nom, alors qu’il est concerné au premier chef, en sa qualité de détenteur de la légitimité et de la souveraineté primaires. Il faut donc oser innover profondément et radicalement». (NDLR, c’est nous qui soulignons).

Ainsi, tout devient clair,les liens et autres recoupements peuvent être établis avec aisance. D’un. Dans un atelier organisé aux Pays-Bas, l’invitation adressée aux Congolais portait la mention «Congo Oriental». Aucun officiel de Kinshasa n’était invité voire informé de l’organisation de cette rencontre avec les pays de la sous-région des Grands Lacs africains. Dans le même pays, une ONG a projeté de réfléchir sur les frontières de la RDC en 2020.



Du fait d’occuper, à ce jour, un espace déjà grand comme le territoire rwandais le M23 ne cache plus ses réelles intentions de créer dans cette partie de la RDC un Etat dont l’appellation est mise en circulation. Des observateurs renseignent que l’administration de toutes les localités occupées est coupée du pouvoir provincial et central.

De deux. Des personnalités occidentales se sont lancées dans le jeu, soit directement soit indirectement. D’abord, l’ancien secrétaire d’Etat américain Herman Cohen. Selon lui, la solution à la crise dans les Grands Lacs passerait par le partage des ressources du Congo. Sa thèse a été reprise par l’ex-représentant de l’Union européenne dans les Grands Lacs Aldo Ajello qui, dans son livre, n’exclut pas la possibilité de retoucher les frontières actuelles. En son temps, l’ancien président français Nicolas Sarkozy a fait la même proposition.

Le dénominateur commun c’est que tous optent pour un partage des ressources, non pas de tout le Congo mais du «Congo Oriental», comme ils affectionnent de le désigner. Même les artistes sont utilisés pour soutenir ce projet d’éclatement de la RDC.

Maillon de la chaîne prédatrice, le M23 profite de l’occasion pour inoculer le venin de sa campagne d’acceptation de ce nouveau concept de «Congo Oriental». Que des Congolais qualifient leur propre pays dans les mêmes termes, il y a de quoi se poser des questions sur le rapprochement. Des puissances étrangères tentent d’imposer cette appellation -Congo Oriental- dans la mémoire des nationaux et l’opinion publique internationale. C’est une tactique bien rôdée qui a fait recette ailleurs.

Par ailleurs, à l’initiative de Mme Cindy Hensley McCain et en sa compagnie, l’artiste musicien Ben Affleck a fait le déplacement de l’est de la RDC. A l’issue de la visite, une association a vu le jour. Il s’agit de «Eastern Congo Initiative» (ECI) dont les contours passent encore flous aux yeux des observateurs avisés. Preuve cette déclaration des fondateurs : «Eastern Congo Initiative (ECI) est la seule œuvre caritative et de soutien qui se consacre entièrement à travailler avec et pour les habitants de l'Est du Congo. Nous souhaitons voir l'Est du Congo revivre et offrir une myriade d'opportunités de développement économique et social ainsi qu'une société civile efficace. L'ECI est persuadée qu'une approche locale s'appuyant sur les communautés est essentielle pour qu'émerge une société viable et dynamique dans l'Est du Congo».

Ce qui est vrai, c’est que les Congolais ne sont plus dupes. Ils ont été dupés plusieurs fois, cela ne devrait pas continuer éternellement. Ils ne pourront pas accepter la réédition du coup perpétré entre 15 et 19ème siècle par les Occidentaux avec la traite négrière, encore moins celui de 1885 relatif à la colonisation du continent africain. Les Congolais n’acceptent pas de payer la facture de la débâcle financière du monde occidental.

Au contraire, ils sont prêts à accepter un vrai partenariat qui ne passe pas par les génocides, les pillages, les viols et autres exactions humiliantes.


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