mercredi 27 mars 2013
Bosco Ntaganda Congolais ou Rwandais ?
(L'Avenir Quotidien 27/03/2013)
S’exprimant en Kinyarwanda, le présumé coupable Bosco Ntaganda dit noir sur blanc qu’il est de nationalité congolaise bien qu’il soit né au Rwanda. Et pourtant, ce sinistre officier a servi dans l’armée congolaise comme dans celle du Rwanda
Pour plusieurs observateurs, contester la nationalité congolaise aux seigneurs de guerre revient, en réalité, à rendre hypothétiques toutes les chances d’actionner les poursuites judiciaires ultérieures pour des crimes, pourtant imprescriptibles, dont se sont rendus coupables ces hommes non pas contre des Rwandais, mais contre des Congolais
Le gouvernement de la République doit user de son influence pour que cesse cette anarchie qui fait que certaines gens de l’Est (notamment des Kivus) et du Rwanda ou Burundi bradent la nationalité congolaise devenue comme une loque.
Comme prévu, Bosco Ntaganda a comparu hier pour la toute première fois devant la barre de la Cour Pénale Internationale où il séjourne depuis le vendredi 22 mars dernier. C’est au cours de cette audience que Mme la juge Ekaterina Trendafilova, présidente de la Chambre préliminaire II, a vérifié l’identité de M. Ntaganda et s’est assurée qu’il a été informé des crimes qui lui sont reprochés et des droits que lui reconnaît le Statut de Rome.
La Procureur lui a signifié toutes les charges pour lesquelles il est poursuivi devant cette juridiction internationale. Il s’agit des crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis en 2002 et 2003 en Ituri dans la province Orientale.
L’accusation affirme en outre qu’il a commis, au sein de l’UPC (Union des Patriotes Congolais) dont il était membre, des meurtres, des viols, des pillages et des persécutions à l’endroit de la population civile du reste innocente.
Ouvrons une parenthèse pour dire que pour l’heure, l’ancien chef rebelle n’est pas poursuivi pour les crimes commis au sein du CNDP ni ceux dont certaines ONGs l’accusent lorsqu’il avait décidé de rejoindre les FARDC à la faveur de l’accord de paix du 23 mars 2009 et plus récemment au sein du M23 dont les exactions ont été dénoncées en novembre par les experts des Nations Unies dans un rapport qui a mis a nu le soutien du Rwanda à ce mouvement rebelle. L’opinion souhaite vivement que ces charges soient ajoutées à celles de 2002 et 2003.
Bosco Ntaganda plaide non coupable
Le présumé coupable a souhaité s’exprimer en kinyarwanda qui est sa langue maternelle. Bosco qui a plus de 39 ans (puisque né au Rwanda le 5 novembre 1973) a décliné toute son identité. « Je suis né au Rwanda mais je suis de nationalité congolaise », a-t-il dit au juge de la Cour. Il a ensuite expliqué qu’il était militaire au Congo et dit avoir pris connaissance des charges qui lui sont imputées mais pour lesquelles il nie être responsable. En d’autres termes, Bosco Ntaganda plaide non coupable.
Faut-il en rire ou en pleurer tant ce gros mensonge fait jaser les bonnes consciences ? Comme tout présumé coupable, il a tenté de se défendre pour probablement « amadouer » la Cour. Mais, la juge l’a interrompu parce qu’il voulait en dire plus sur sa déclaration. Il aura tout le temps de se défendre en long et en large le 23 septembre prochain lors de l’audience de confirmation des charges.
Même s’il ment, c’est bien. Mais qu’il sache que le sang des nombreuses victimes innocentes qu’il a tuées ou fait tuer le contraindra tôt ou tard à révéler la vérité toute nue qui le clouera au pilori. Ce sang-là criera toujours vengeance pour autant qu’il a été versé inutilement et gratuitement sans cause. C’est un principe spirituel immuable. Cette vérité-là nous fera probablement découvrir les commanditaires et les co-auteurs de ces crimes odieux qui se retrouvent par les sphères du pouvoir dans les pays qui le soutenaient à bout de bras en dépit de leurs dénégations.
La problématique de la nationalité
La problématique de la nationalité a toujours fait polémique s’agissant des citoyens habitant les provinces de l’Est de la République démocratique du pays.
Le présumé coupable Bosco Ntaganda dit noir sur blanc qu’il est de nationalité congolaise bien qu’il soit né au Rwanda. Et pourtant, ce sinistre officier a servi dans l’armée congolaise comme dans celle du Rwanda. C’est déjà une entorse à la Constitution de la Rdc qui dispose en son article 10 du chapitre 2 : « La nationalité congolaise est une et exclusive. Elle ne peut être détenue concurremment avec aucune autre ». Dans un autre alinéa, le même article stipule que « la nationalité congolaise est soit d’origine, soit d’acquisition individuelle … ».
Le gouvernement de la République doit user de son influence pour que cesse cette anarchie qui fait que certaines gens de l’Est (notamment des Kivus) et du Rwanda ou Burundi bradent la nationalité congolaise devenue comme une loque.
A la dernière législature, un député national de l’opposition avait soulevé cette problématique de la nationalité. La question ayant été très délicate et glissante, un moratoire de quelques mois avait été décidé avant que le parlement ne se saisisse du problème plus en profondeur. Mais depuis lors, la question a été enterrée et on n’en parle plus de peur de réveiller de graves susceptibilités dans le chef de pas mal de députés nationaux et sénateurs.
L’opinion est d’avis que tous les scénarii jouées par certaines gens se proclamant tantôt Rwandais tantôt Congolais doit prendre fin. Il faut reconnaître que cette situation de fait qui dure depuis de longues décennies a été favorisée par la 2è République du Maréchal Mobutu Sese Seko. Nous allons seulement épingler un cas qui a fait école. C’est celui de feu Bisengimana Rwema, paix à son âme.
L’histoire retient qu’à l’Université Lovanium, il était le président des étudiants rwandais qui bénéficiaient de la bourse d’études du gouvernement rwandais. En dépit de sa nationalité prouvée noir sur blanc, le président Mobutu le nomma directeur de son cabinet pendant près de douze ans alors qu’il y avait des valeurs nationales d’envergure. C’est à la faveur de ce cas que Mobutu dut prendre une ordonnance grâce à laquelle des milliers de Rwandais devenaient du jour au lendemain des Congolais dont beaucoup d’entre eux firent une entrée fracassante dans les institutions et dans les entreprises publiques.
Le moins que les Congolais puissent attendre de la CPI est de sanctionner sévèrement Bosco Ntaganda qui, Rwandais de son état, n’a pas hésité de verser le sang des Congolais innocents. Ce, au nom des intérêts des multinationales et des pays commanditaires.
Les accepter tout le monde
A ce jour, le premier risque encouru par ceux qui prétendent que Bosco Ntaganda n’est pas congolais est de rendre, par exemple, nulle et de nuls effets la décision de radiation prise le vendredi 6 juillet 2012 par le Conseil supérieur de la défense à l’encontre du général Bosco Ntanganda, des colonels Ruzandiza (Makenga Sultani), Kahasha, Vianney Kazarama, Sabimana, Saddam Ringo, Bernard Byamungu, Innocent Kahina, Zimurinda, Baudouin Ngaruye, Biyoyo et Ngabo alias « Zaïrois », en plus des lieutenants colonels Douglas et Mboneza suivi de « toutes les autres têtes d’affiche du M.23 », de même que l’émission du mandat d’arrêt national établi contre Laurent Nkunda et Jules Mutebusi.
Pour plusieurs observateurs, leur contester la nationalité congolaise revient, en réalité, à rendre hypothétiques toutes les chances d’actionner les poursuites judiciaires ultérieures pour des crimes, pourtant imprescriptibles, dont se sont rendus coupables ces hommes non pas contre des Rwandais, mais contre des Congolais.
Et si, dans ce cas, les instances internationales comme la CPI ou les instances judiciaires congolaises venaient à émettre contre eux des mandats d’arrêt alors qu’ils passent pour ne pas être des Congolais, on ne voit pas concrètement parlant comment le gouvernement congolais, celui d’aujourd’hui ou de demain, s’y prendrait et pourquoi, par exemple, le gouvernement rwandais coopérerait pour « extrader » à la Cpi ou en Rdc ses ressortissants rwandais.
La sagesse commande qu’on considère donc les éléments de l’Upc, du Cndp et du M 23 qui se disent Congolais comme étant effectivement des Congolais. « Ce n’est que de cette façon que les poursuites judiciaires auront un sens soit au plan national, soit au plan international. Les crimes étant imprescriptibles, ces sinistres personnages répondront de leurs actes tôt ou tard », indique une chronique du confrère Omer Songo, avant de conclure par rapport à l’affaire Bosco Ntanganda, que les Congolais doivent éviter de se faire prendre dans le piège de la stigmatisation.
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