(Agence Syfia 31/05/2013 - 06:47)
Au Sud-Kivu, dans le territoire d'Uvira et la plaine de la Ruzizi, pour compenser l'irrégularité des Congolais au Burundi, l'immigration laisse traverser des Burundais sans laissez-passer. Une réciprocité illégale, mais qui promeut la libre circulation et l'intégration régionale.
De retour dans leur pays, quatre Burundais se présentent à l’immigration congolaise. Il est 11 heures, ce samedi 27 avril au poste frontalier de Kavimvira. Sans document migratoire (laissez-passer individuel), ils n’ont que leurs pièces d’identité nationale burundaise. Une brève discussion avec un agent de la Direction générale de migration (DGM) s'engage. Il les laisse traverser quelques minutes plus tard, sans même recevoir de pot-de-vin. "Ces visages me sont familiers", se justifie-t-il.
On compte plus d'une dizaine de pareils cas chaque jour. Rien de plus normal aux yeux des frontaliers… "Je suis Burundais, mais toute ma vie c'est en RD Congo ! Je peux payer un laissez-passer individuel d'une durée de trois jours, mais quand j'y vais, c'est pour plus de temps, des fois un an, explique Ismaël avant d'ajouter. Ces barrières ne devraient même pas exister !"
Pourtant, selon l’Ordonnance-loi 83-033 du 12 septembre 1983 relative à la police des étrangers, à sa sortie, l’étranger doit apporter la preuve qu’il a régulièrement séjourné au pays. Son article 4 subordonne la sortie du pays à la détention d’un passeport en cours de validité ou d’un document en tenant lieu. Un laissez-passer individuel dans le cas d’espèce. Souvent cultivateurs et employés de maisons, ils sont nombreux les Burundais à faire des va-et-vient quotidiens entre les deux frontières.
"Le besoin d'intégration le requiert"
Au Burundi voisin, la situation est identique, voire encore plus complexe. "Il y a plus de Congolais au Burundi que de Burundais à Uvira et dans la plaine de la Ruzizi. Nombreux sont malheureusement en situation irrégulière. Ils sont petits commerçants transfrontaliers ou étudiants", affirme un agent de l’immigration burundaise. Ainsi, "réprimer les Burundais irréguliers serait plus répréhensible aux Congolais, estime un agent de la DGM à Uvira. Pour compenser la tranquillité de nos compatriotes, nous nous refusons de les inquiéter.
C’est sur base d'une directive de la hiérarchie que nous le faisons", affirme-t-il.
Depuis la rencontre à Gisenyi (Rwanda) des directeurs généraux des services de migration de la RDC, Rwanda et Burundi en 2009 dans le cadre de la Communauté économique des pays des grands lacs (CEPGL), les trois nations visent à harmoniser leurs positions sur la libre circulation des personnes et des biens au sein de cette communauté.
"Nous avons commencé et la RDC a suivi en 2012", souligne un autre agent d’immigration burundais. "Même sans accord formel, la réciprocité l'exige. Le besoin d'intégration le requiert", soutient Adolphe Kilomba, avocat et spécialiste de la région des Grands lacs.
Bien qu’illégal, ce laisser-faire promeut, en effet, la libre circulation entre les deux Etats et l’intégration régionale, deux des objectifs de la Convention portant création de la CEPGL, conclue à Gisenyi le 20 septembre 1976.
La sécurité d'abord ?
Avec l’application de la suppression du paiement de visa (50 $) par le Burundi et la RDC pour leurs citoyens et son remplacement par un simple laissez-passer (entre 1,5 et 3 $), les Burundais approvisionnent en fretins et bières les marchés d’Uvira et de la plaine de la Ruzizi. Les Congolais, eux, desservent leur voisin en pagnes, bijoux et huiles de beauté. "Deux économies désormais complémentaires, souligne Emile Byeka, économiste congolais. Ainsi, le 27 janvier dernier, à cause de l'incendie à 30 km d’Uvira, à Bujumbura (capitale du Burundi) du marché central certains commerçants (d'Uvira et de Bukavu, Ndlr) sont tombés en faillite", poursuit-il.
La libre circulation oui, mais la sécurité d’abord, pensent les plus réticents. "Avec l'insécurité dans la partie est de la RDC, frontalière du Burundi notamment, ce laisser-faire représente une aubaine pour des éléments perturbateurs d'entrer sans se gêner au pays", redoute un membre d’un parti politique qui propose le renforcement des formalités douanières. Mais, au niveau de la CEPGL, des pourparlers se poursuivent pour l’usage de la carte nationale d’identité comme seul document de migration pour les populations de la Communauté.
Pierre Kilele Muzaliwa, Patient Debaba Lufira
De retour dans leur pays, quatre Burundais se présentent à l’immigration congolaise. Il est 11 heures, ce samedi 27 avril au poste frontalier de Kavimvira. Sans document migratoire (laissez-passer individuel), ils n’ont que leurs pièces d’identité nationale burundaise. Une brève discussion avec un agent de la Direction générale de migration (DGM) s'engage. Il les laisse traverser quelques minutes plus tard, sans même recevoir de pot-de-vin. "Ces visages me sont familiers", se justifie-t-il.
On compte plus d'une dizaine de pareils cas chaque jour. Rien de plus normal aux yeux des frontaliers… "Je suis Burundais, mais toute ma vie c'est en RD Congo ! Je peux payer un laissez-passer individuel d'une durée de trois jours, mais quand j'y vais, c'est pour plus de temps, des fois un an, explique Ismaël avant d'ajouter. Ces barrières ne devraient même pas exister !"
Pourtant, selon l’Ordonnance-loi 83-033 du 12 septembre 1983 relative à la police des étrangers, à sa sortie, l’étranger doit apporter la preuve qu’il a régulièrement séjourné au pays. Son article 4 subordonne la sortie du pays à la détention d’un passeport en cours de validité ou d’un document en tenant lieu. Un laissez-passer individuel dans le cas d’espèce. Souvent cultivateurs et employés de maisons, ils sont nombreux les Burundais à faire des va-et-vient quotidiens entre les deux frontières.
"Le besoin d'intégration le requiert"
Au Burundi voisin, la situation est identique, voire encore plus complexe. "Il y a plus de Congolais au Burundi que de Burundais à Uvira et dans la plaine de la Ruzizi. Nombreux sont malheureusement en situation irrégulière. Ils sont petits commerçants transfrontaliers ou étudiants", affirme un agent de l’immigration burundaise. Ainsi, "réprimer les Burundais irréguliers serait plus répréhensible aux Congolais, estime un agent de la DGM à Uvira. Pour compenser la tranquillité de nos compatriotes, nous nous refusons de les inquiéter.
C’est sur base d'une directive de la hiérarchie que nous le faisons", affirme-t-il.
Depuis la rencontre à Gisenyi (Rwanda) des directeurs généraux des services de migration de la RDC, Rwanda et Burundi en 2009 dans le cadre de la Communauté économique des pays des grands lacs (CEPGL), les trois nations visent à harmoniser leurs positions sur la libre circulation des personnes et des biens au sein de cette communauté.
"Nous avons commencé et la RDC a suivi en 2012", souligne un autre agent d’immigration burundais. "Même sans accord formel, la réciprocité l'exige. Le besoin d'intégration le requiert", soutient Adolphe Kilomba, avocat et spécialiste de la région des Grands lacs.
Bien qu’illégal, ce laisser-faire promeut, en effet, la libre circulation entre les deux Etats et l’intégration régionale, deux des objectifs de la Convention portant création de la CEPGL, conclue à Gisenyi le 20 septembre 1976.
La sécurité d'abord ?
Avec l’application de la suppression du paiement de visa (50 $) par le Burundi et la RDC pour leurs citoyens et son remplacement par un simple laissez-passer (entre 1,5 et 3 $), les Burundais approvisionnent en fretins et bières les marchés d’Uvira et de la plaine de la Ruzizi. Les Congolais, eux, desservent leur voisin en pagnes, bijoux et huiles de beauté. "Deux économies désormais complémentaires, souligne Emile Byeka, économiste congolais. Ainsi, le 27 janvier dernier, à cause de l'incendie à 30 km d’Uvira, à Bujumbura (capitale du Burundi) du marché central certains commerçants (d'Uvira et de Bukavu, Ndlr) sont tombés en faillite", poursuit-il.
La libre circulation oui, mais la sécurité d’abord, pensent les plus réticents. "Avec l'insécurité dans la partie est de la RDC, frontalière du Burundi notamment, ce laisser-faire représente une aubaine pour des éléments perturbateurs d'entrer sans se gêner au pays", redoute un membre d’un parti politique qui propose le renforcement des formalités douanières. Mais, au niveau de la CEPGL, des pourparlers se poursuivent pour l’usage de la carte nationale d’identité comme seul document de migration pour les populations de la Communauté.
Pierre Kilele Muzaliwa, Patient Debaba Lufira
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