(L'Avenir Quotidien 11/10/2012)
*Le porte-parole du Gouvernement a reconnu qu’il arrive que
des dépositaires de l’autorité de l’Etat congolais agissent en marge des lois,
des règlements et des droits des personnes. L’option prise par le gouvernement
en la matière, contenue dans la formule « Tolérance zéro » est de sanctionner
sans complaisance de tels abus, administrativement et judiciairement.
*En
matière des droits de l’opposition, il n’est pas exagéré d’affirmer que la RD
Congo d’aujourd’hui est l’un des rares pays d’Afrique subsaharienne dans
lesquels les droits de l’opposition sont reconnus et d’application et ce, depuis
des lustres. Elle siège à l’Assemblée nationale, au Sénat et dans l’ensemble des
Assemblées provinciales du pays, elle dispose d’une structure constitutionnelle
prise en charge par l’Etat pour faire entendre officiellement sa
voix.
C’est en principe demain vendredi que va s’ouvrir le XIVème sommet
de la Francophonie à Kinshasa, capitale de la Rd Congo. Intervenant mardi
dernier depuis Paris où il tenait un point de presse conjoint avec Ban Ki-Moon,
Secrétaire général des Nations Unies, François Hollande, président français a
indiqué que la situation dans ce pays est tout à fait inacceptable sur le plan
des droits, de la démocratie, et de la reconnaissance de l’opposition. La Rd
Congo, à travers Lambert Mende, porte-parole du Gouvernement a convoqué la
presse hier pour éclairer la religion du président Français sur les droits de
l’homme, la démocratie et la reconnaissance de l’opposition.
En effet,
Lambert Mende souligne que si chaque membre de l’Union Africaine devant
participer à une réunion au siège de cette organisation à AddisAbeba se
permettait de porter des jugements de valeur sur la façon dont l’Ethiopie est
gouvernée ; si chaque dirigeant du monde avant de prendre part à l’Assemblé
Générale des Nations-Unies à New York devait s’autoriser à dire tout le mal
qu’il pense du gouvernement des Etats-Unis, la vie internationale ne serait pas
possible.
Car selon le ministre, le Président François Hollande nous a
donné l’impression à travers sa déclaration de s’être littéralement fait piéger
par un seul son de cloche émanant d’officines connues en France et en RD Congo
en relayant de manière complaisante les accusations d’une frange extrémiste de
l’opposition congolaise selon lesquelles la situation de la démocratie, des
droits de l’Homme et des droits de l’opposition est « tout à fait inacceptable »
dans notre pays.
Ne pas accepter les contre-vérités
Le
Gouvernement de la RD Congo ne peut pas laisser dire des contre-vérités sur
l’Etat de la démocratie et des droits de l’Homme, y compris les droits de
l’opposition dans son espace. « Nous n’avons jamais rejeté les critiques
objectives et fondées sur le souci d’aider à améliorer la gouvernance dans notre
pays », reconnait-il.
Force est de constater malheureusement que tel
n’est manifestement pas le but poursuivi à travers les propos du Président
français qui procèdent d’une lecture politiquement biaisée de la situation en RD
Congo, mentionne Lambert Mende dans son point de presse. Bien plus, « je dirai
qu’on n’est pas loin de l’insulte à l’égard de ce grand peuple qui s’est
mobilisé depuis les années de la deuxième République pour conquérir de haute
lutte les espaces de libertés qui sont une réalité palpable à l’heure actuelle
en dépit des difficultés d’ordre économique et sécuritaire qui l’assaillent
».
Il a rappelé les efforts fournit par son pays, notamment
l’organisation d’un référendum constitutionnel et deux élections générales avec
leurs tâtonnements et dysfonctionnements. Et ce, malgré les multiples défis
sécuritaires. S’agissant des dysfonctionnements du dernier en date des cycles
électoraux, faut-il rappeler que le Président Joseph Kabila a été parmi les
premiers à les dénoncer ? Que le gouvernement et le parlement congolais ont
d’ores et déjà initié le processus de réforme de la Commission électorale dont
le fin mot est attendu pour avant la fin du mois en cours ?
Respecter
l’indépendance du pouvoir judiciaire
S’agissant des droits de l’Homme, le
ministre des Médias souligne qu’en l’absence de toute élaboration dans le
discours de Monsieur le Président de la France Président, on en est réduit à
imaginer qu’il faisait allusion au procès sur l’ignoble assassinat du militant
des droits de l’Homme Floribert Chebeya et de son collègue Fidèle Bazana. On
sait que des proches des victimes de ce crime aussi bien dans la société civile
que dans l’opposition trouvent la justice passablement lente dans cette affaire.
C’est le cas pour toutes les parties civiles dans la plupart des affaires du
genre de par le vaste monde.
Cela ne justifie nullement que le Président
de la République française embraye sur cette voie de la passion que l’on peut
bien comprendre chez les proches et amis de M. Chebeya mais qui ne saurait en
aucun cas se justifier dans le chef d’un homme d’Etat pour qui l’indépendance du
pouvoir judiciaire et la seule recherche de la vérité devraient primer. « Le
Gouvernement tient à respecter l’indépendance du pouvoir judiciaire et entend
voir tous ses partenaires manifester à l’égard de notre justice le même respect
dont ils font preuve vis-à-vis de leurs propres cours et tribunaux »,
rassure-t-il.
Il a reconnu qu’il arrive que des dépositaires de
l’autorité de l’Etat congolais agissent en marge des lois, des règlements et des
droits des personnes. L’option prise par le gouvernement en la matière, contenue
dans la formule « Tolérance zéro » est de sanctionner sans complaisance de tels
abus, administrativement et judiciairement. Exactement comme en France ou on
apprend de temps en temps la révocation ou l’arrestation de tel ou tel autre
préposé de la police ou de l’administration. Sans que cela n’autorise à
soupçonner le Gouvernement ou le Président d’avoir commandité de telles
indélicatesses.
La Rd Congo, un modèle en Afrique subsaharienne
En
matière des droits de l’opposition, le ministre a révélé qu’il n’est pas exagéré
d’affirmer que la RD Congo d’aujourd’hui est l’un des rares pays d’Afrique
subsaharienne dans lesquels les droits de l’opposition sont reconnus et
d’application et ce, depuis des lustres. Elle siège à l’Assemblée nationale, au
Sénat et dans l’ensemble des Assemblées provinciales du pays, elle dispose d’une
structure constitutionnelle prise en charge par l’Etat pour faire entendre
officiellement sa voix. C’est peut être le lieu de dire au Président Hollande
que la RD Congo figure sur la « short list » des pays africains qui ont
institutionnalisé un statut légal de l’opposition.
« Dans notre pays,
l’opposition a même eu la latitude de mettre en place un réseau assez dense de
médias audiovisuels et écrits ayant pignon sur rue pour diffuser quotidiennement
des messages alternatifs. Elle organise régulièrement des activités de masse
avec l’encadrement de la Police ». Tous les dignitaires étrangers en visite en
RD Congo qui le souhaitent rencontrent librement les membres de l’opposition. En
un mot comme en cent, l’opposition en RD Congo est tout à fait à l’aise dans son
rôle. Nous avons du mal à identifier les droits que le Président français
revendique pour nos collègues de l’opposition. Faudrait-il que la Majorité cesse
de gouverner pour céder à l’opposition les leviers du pouvoir pour contenter
notre hôte ? On ne voit pas bien comment cela se pourrait. Peut-être devrait-il
commencer par le faire en France en cohabitant avec son opposition alors qu’il
est majoritaire comme nous au parlement !
En réalité, nous nous perdons
en conjectures sur ce qui pourrait bien justifier l’impatience et la mauvaise
humeur du Chef de l’Etat français qui a parlé comme si il était attitré à donner
des injonctions au Parlement et aux Cours et Tribunaux de la RD Congo sur le
timing et le contenu de leurs débats, délibérations et décisions.
« Nous
avions cru à une blague de mauvais goût lorsque des médias en France
prétendaient que la tenue du Sommet de la Francophonie à Kinshasa était
conditionnée dans les allées du pouvoir dans leur pays par l’aboutissement
préalable des réformes institutionnelles en RD Congo, notamment dans les
domaines des droits de l’Homme et des élections (adoption au parlement et
promulgation par le Président Kabila d’une loi instituant la Commission
Nationale des Droits de l’Homme et révision de la loi sur la CENI) ». Force est
de constater qu’ils n’avaient peut-être pas tort. C’est le lieu pour le
Gouvernement congolais de réaffirmer, une fois de plus, que toutes ces réformes,
bel bien mises en chantier, procèdent d’un processus interne et ne peuvent en
aucune façon résulter de pressions extérieures. Le parlement congolais a sa
dynamique démocratique propre. C’est ce qui apparaît au grand jour avec les
débats houleux entre la Majorité et l’Opposition en son sein autour de la
réforme de la loi sur la CENI. Il en est de même de la justice qui jouit de son
indépendance et qui rendra son verdict à son propre rythme, en fonction de sa
dynamique, de sa rationalité et surtout de son intime conviction. Une justice
qui dit le droit sous la pression, fut-elle de la part d’un pays ami comme la
France n’en est plus une. Une justice expéditive n’est qu’un grossier lynchage.
Evitons de mélanger les genres.
De ce qui précède, nous pensons comme
certains opérateurs politiques français du reste que la sortie du Président de
la République française était pour le moins excessive et hâtive.
L’Avenir
10 10 2012
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