(Le Potentiel 12/01/2013)
Entre Kinshasa et le M23, c’est de nouvelles noces. Le
groupe armé pro-rwandais aurait obtenu, des pourparlers de Kampala, une partie
du territoire de la RDC, en plus de postes ministériels. C’est la presse
ougandaise qui fait état de ce deal en échange d’un retour de la paix dans l’Est
du pays. Ceci pourrait expliquer cela, notamment le fait que le M23 ait fait
volte-face dernièrement après avoir décrété unilatéralement un cessez-le-feu
auquel Kinshasa s’était opposé farouchement.
Ce n’est pas un canular.
Pas non plus une illusion. C’est plutôt une réalité que rapporte la presse
ougandaise qui couvre depuis décembre 2012 des pourparlers directs entre
Kinshasa et le M23 (Mouvement du 23 mars). En effet, selon des coupures des
journaux paraissant à Kampala, Kinshasa aurait, en échange d’un retour de la
paix dans l’Est de la RDC, consenti de céder au M23 une portion du territoire de
la RDC.
Même si aucune précision n’a été donnée sur cette portion, l’on
suppose que l’objet du troc porte sur les territoires de la province du
Nord-Kivu, actuellement sous contrôle du groupe armé à la solde de
Kigali.
Pour ceux qui suivent de près l’évolution de la situation
d’insécurité dans l’Est, cette révélation est une lapalissade. Tous les
spécialistes de la région des Grands Lacs connaissent les tenants et
aboutissants de la guerre imposée en RDC depuis près de deux décennies. Si
jamais l’information venait à être confirmée officiellement, le M23, une
émanation du CNDP/RCD/RDF, aura obtenu ce qu’il recherche depuis belle
lurette.
Sa dénomination elle-même est très éloquente. Elle rappelle
l’accord du 23 mars 2009 signé à Goma entre le gouvernement et des groupes armés
œuvrant dans l’Est du territoire national, dont principalement le
CNDP.
Kampala : plus que jamais un mystère
La nouvelle est
tellement sensible que l’honorable Konde Vila Kikanda, président du Caucus des
députés nationaux du Nord-Kivu, s’est empressé de démentir, au nom de la
délégation gouvernementale à Kampala, les révélations faites par les confrères
ougandais. C’était hier vendredi au moyen d’un coup de fil à la RTVS 1, radio
émettant à Kinshasa.
Au cours de son intervention, l’honorable Konde Vila
Kikanda, élu de Goma, a démenti de la manière la plus forte les révélations
faites par la presse ougandaise. Selon lui, il ne sera nullement question à
Kampala de brader l’intégrité territoriale de la RDC, ni d’envisager un
quelconque partage de pouvoirs avec le M23. Qui dit mieux ?
Que la presse
ougandaise se soit autorisée à publier cette information, c’est qu’elle est
allée à la source. Pour autant que depuis décembre 2012, la capitale ougandaise,
Kampala, est le théâtre des va-et-vient des protagonistes dans la crise qui
sévit dans l’Est du Congo. De fil en aiguille, l’on commence peu à peu à
comprendre le revirement du M23, son langage conciliant qui rompt avec celui
tranchant qui le caractérisait au début des pourparlers.
Un nuage épais
entoure désormais le dialogue de Kampala. Kinshasa est obligé de sortir de sa
tour d’ivoire pour rassurer son opinion publique. Hier vendredi devant la
presse, Lambert Mende Omalanga, ministre des Médias, chargé des Relations avec
le Parlement et de l’Initiation à la nouvelle citoyenneté, a effleuré le sujet,
sans vraiment aller en profondeur.
« Il faut encore et toujours redire
que rien à Kampala ou ailleurs ne se fera en violation de la Constitution et des
lois de la République démocratique du Congo », a déclaré le porte-parole du
gouvernement. Une déclaration qui, pense-t-il, « devrait rassurer ceux parmi nos
compatriotes qui craignent que ne s’installe chez nous une sorte de culture de
prime à la violence ». « Les Congolaises et les Congolais peuvent faire
totalement confiance en la délégation gouvernementale qui siège à Kampala »,
a-t-il ajouté. Comme pour dire qu’à Kampala, rien ne se décidera au détriment de
la RDC.
D’aucuns estiment que ce n’est pas suffisant pour balayer les
supputations et autres rumeurs qui circulent dans les coulisses des pourparlers
de Kampala. Bien des zones d’ombre entourent encore ce dialogue. C’est le cas du
maintien de Kampala comme lieu des négociations alors que la présidence de la
Conférence internationale sur la région des Grands Lacs(CIRGL) revient à la
République du Congo (Brazzaville).
Mende contredit Hamuli
Là
aussi, l’opinion est toujours désemparée. Elle ne sait plus à qui se fier.
Tellement les contradictions entre membres du gouvernement se multiplient. La
dernière en date est celle relative à la présidence de la CIRGL. Dans un
rectificatif, daté du 8 janvier 2013 et envoyé à la presse écrite de Kinshasa
par le coordonnateur national de la CIRGL, Baudouin Hamuli Kabaruza, il est
écrit ce qui suit : « La CIRGL est présidée depuis le 15 décembre 2011 par
l’Uganda. C’est donc naturellement Son excellence le Président Yoweri Museveni
qui est le Président en exercice, et son mandat court jusqu’au 15 décembre 2013
».
Intervenant trois jours plus tard, soit le 11 janvier 2013, Lambert
Mende a déclaré à la presse : « Nous nous réjouissons de la position prise par
Monsieur le Président Denis Sassou Nguesso de la République du Congo-Brazzaville
qui, dès son entrée en fonction en qualité de Président en exercice de la
Conférence internationale sur la région des Grands Lacs, a exprimé l’intérêt
particulier au retour de la paix en République démocratique du Congo.
Que
dire de cette cacophonie au sein du gouvernement ? Il y a un problème sérieux de
fonctionnement normal des institutions. Chacun y va de son point de vue, sinon
de son humeur. Mettant à nu la marche en ordre dispersé de l’Exécutif national.
Hier c’est le ministre des Potes, télécommunications, Nouvelles technologies de
l’information et de la communication s’est mis en porte-à-faux par rapport à son
collègue des Affaires étrangères.
Il a déclaré à l’agence belge Belga que
les pourparlers de Kampala visaient à écouter les Congolais qui ont rejoint le
M23. Déclaration qui contredisait celle du chef de la délégation qui trouvait
illogique la poursuite des discussions avec le M23. Evidemment, du fait que les
revendications de ce dernier traduisaient son aliénation à des puissances
extérieures.
Aujourd’hui, c’est encore le ministère des Affaires
étrangères qui entre en contradiction avec le porte-parole du gouvernement. Dans
la mesure où la coordination nationale de la CIRGL que dirige M. Hamuli
Kabaruza, est une structure qui relève du ministère des Affaires étrangères.
C’est même le chef de la diplomatie congolaise qui conduit la délégation du
gouvernement à Kampala. Qui dit vrai ? Qui dit faux ? Du reste, qui d’entre
Hamuli Kabraruza et Lambert Mende est au fait de l’actualité ? La question reste
ouverte.
Une question en appelant une autre, pourquoi tient-on tant à la
poursuite des discussions entre le M23 et Kinshasa à Kampala ? De toutes ces
questions, il s’en suit qu’un flou persiste sur ce qui se passe réellement dans
la capitale ougandaise. L’opinion risque d’être mise à l’écart des dessous de
cartes de ces discussions.
Raison pour laquelle le peuple congolais
devrait rester constamment éveillé de manière à faire échec à tout projet de
remise en cause de l’intégrité de son territoire.
Publié le samedi 12
janvier 2013 00:58
Écrit par Le Potentiel
© Copyright Le
Potentiel
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire