L’intervention française au Mali "durera le temps nécessaire", a déclaré Paris. Les objectifs affichés, enrayer la progression des islamistes et permettre au Mali de retrouver son intégrité territoriale, s’annoncent compliqués à atteindre.
Par Gaëlle LE ROUX
Depuis le début de l’opération Serval au Mali, les responsables politiques français n’ont de cesse de le rappeler : l’intervention française ne se résume pas à des raids éclairs menés en une poignée de jours. L’opération pourrait durer plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Samedi, alors que les forces françaises et maliennes sont parvenues à enrayer la progression des rebelles islamistes vers le centre et le sud du pays, le président François Hollande a ainsi clairement prévenu : "Notre mission au Mali n’est pas achevée".
"Je ne vais pas vous dire à quel moment nos opérations vont se terminer, on ne le sait pas", a déclaré en écho Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense, sur Europe 1 dimanche matin, au troisième jour de l’opération. "La France est au Mali pour permettre au gouvernement malien de retrouver son intégrité et faire procéder à des élections au Mali une fois le conflit terminé. Nous mettrons en place le dispositif militaire nécessaire pour arriver à nos fins", a-t-il également précisé, ajoutant qu’il était nécessaire pour cela de bloquer la progression des islamistes et d’éradiquer totalement le terrorisme.
Ces deux objectifs militaires affichés - bloquer l’offensive des rebelles vers le sud et permettre au pays de recouvrer son intégrité territoriale - sont pour le moins ambitieux : le Nord-Mali est un territoire grand comme la France et les combattants islamistes, très mobiles et bien équipés, connaissent parfaitement le terrain. D'autant que la mort d'un soldat français dès les premiers affrontements a rappelé la dangerosité du terrain, tant aux politiques qu'à l'opinion publique. Si les autorités françaises se félicitent du succès de l’opération menée depuis vendredi, elles se gardent bien, en revanche, de se prononcer sur les modalités de la reconquête du Nord-Mali.
La difficile reconquête du Nord-Mali
"Autant l’arrêt des colonnes de véhicules parfaitement repérables dans un territoire désertique était quelque chose de relativement simple à exécuter, autant le rétablissement de l’ordre dans la partie nord sera dans les faits beaucoup plus longue.
C’est évidemment une affaire de mois et de moyens [matériels et humains, ndlr]", estime le général Vincent Desportes, ancien directeur de l’École de guerre, interrogé samedi par France Inter. La France, d’ailleurs, ne devrait pas s’y risquer seule. Elle devrait attendre la formation de la force internationale mandatée par la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) pour reconquérir le nord du territoire malien.
Le Niger, le Sénégal et le Burkina Faso ont d’ores et déjà annoncé qu’ils enverraient chacun 500 soldats au Mali. Cependant, les experts militaires s’accordent à dire que l’acheminement des troupes et la formation de l’armée malienne, décapitée et disloquée après le coup d’État du printemps dernier, pourraient prendre plusieurs mois.
La situation géopolitique de la zone complique en outre considérablement les opérations. Les pays du Sahel - cette région désertique sub-saharienne située aux confins de l’Algérie, de la Mauritanie, du Mali, du Niger et du Tchad - comptent parmi les plus pauvres du monde.
Les pouvoirs centraux y sont généralement faibles et leurs frontières extrêmement poreuses. Depuis la chute de Mouammar Kadhfi en Lybie, les armes lourdes et légères ont ainsi afflué vers le nord du Mali, devenu un sanctuaire pour les groupes islamistes armés souvent affiliés à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). La pacification de la zone s’avère, dans ce contexte, très complexe.
La nécessité de perspectives de développement
Pour Philippe Hugon, directeur de recherche à l’Institut de recherche internationale et stratégique (Iris), la victoire contre les combattants islamistes ne se fera pas simplement à travers des conquêtes militaires : "Il faut à la fois avoir une action militaire, avoir une action humanitaire […] mais aussi toujours avoir en perspective des projets de développement, estime-t-il sur l’antenne de FRANCE 24.
Il est évident qu’une guerre contre les djihadistes ne se gagne pas uniquement du point de vue militaire, parce qu’ils connaissent le terrain, parce qu’ils ont des possibilités de se réfugier sous des tentes ou dans des grottes, et parce que de toute façon le terreau de leur action c’est à la fois le fanatisme religieux, mais c’est aussi le trafic de drogue et le fait que les jeunes ont très peu de perspectives".
Une déclaration qui fait écho à un éditorial, écrit par Dominique de Villepin, ancien ministre de la Défense, dans le "Journal du Dimanche" daté du 13 janvier. Celui qui, en 2003, avait porté devant l’ONU le veto français à la guerre en Irak estime qu’un "processus politique est seul capable d’amener la paix au Mali".
"Jamais ces guerres [contre le terrorisme] n’ont bâti un État solide et démocratique. Au contraire, elles favorisent les séparatismes, les États faillis, la loi d’airain des milices armées. Jamais ces guerres n’ont permis de venir à bout des terrorismes essaimant dans la région. Au contraire, elles légitiment les plus radicaux", poursuit l’ancien ministre, citant en exemple l’Irak, l’Afghanistan et la Libye.
Villepin pointe également du doigt le manque d'appui régional solide. "Il faut une dynamique régionale, en mobilisant l’acteur central qu’est l’Algérie et la Cédéao en faveur d’un plan de stabilisation du Sahel", préconise-t-il. Pour l'heure, Alger a exprimé son soutien "sans équivoque" aux autorités maliennes, mais il n'en demeure pas moins hostile aux interventions étrangères dans la région, a fortiori de l'ancienne puissance coloniale.
"Je ne vais pas vous dire à quel moment nos opérations vont se terminer, on ne le sait pas", a déclaré en écho Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense, sur Europe 1 dimanche matin, au troisième jour de l’opération. "La France est au Mali pour permettre au gouvernement malien de retrouver son intégrité et faire procéder à des élections au Mali une fois le conflit terminé. Nous mettrons en place le dispositif militaire nécessaire pour arriver à nos fins", a-t-il également précisé, ajoutant qu’il était nécessaire pour cela de bloquer la progression des islamistes et d’éradiquer totalement le terrorisme.
Ces deux objectifs militaires affichés - bloquer l’offensive des rebelles vers le sud et permettre au pays de recouvrer son intégrité territoriale - sont pour le moins ambitieux : le Nord-Mali est un territoire grand comme la France et les combattants islamistes, très mobiles et bien équipés, connaissent parfaitement le terrain. D'autant que la mort d'un soldat français dès les premiers affrontements a rappelé la dangerosité du terrain, tant aux politiques qu'à l'opinion publique. Si les autorités françaises se félicitent du succès de l’opération menée depuis vendredi, elles se gardent bien, en revanche, de se prononcer sur les modalités de la reconquête du Nord-Mali.
La difficile reconquête du Nord-Mali
"Autant l’arrêt des colonnes de véhicules parfaitement repérables dans un territoire désertique était quelque chose de relativement simple à exécuter, autant le rétablissement de l’ordre dans la partie nord sera dans les faits beaucoup plus longue.
C’est évidemment une affaire de mois et de moyens [matériels et humains, ndlr]", estime le général Vincent Desportes, ancien directeur de l’École de guerre, interrogé samedi par France Inter. La France, d’ailleurs, ne devrait pas s’y risquer seule. Elle devrait attendre la formation de la force internationale mandatée par la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) pour reconquérir le nord du territoire malien.
Le Niger, le Sénégal et le Burkina Faso ont d’ores et déjà annoncé qu’ils enverraient chacun 500 soldats au Mali. Cependant, les experts militaires s’accordent à dire que l’acheminement des troupes et la formation de l’armée malienne, décapitée et disloquée après le coup d’État du printemps dernier, pourraient prendre plusieurs mois.
La situation géopolitique de la zone complique en outre considérablement les opérations. Les pays du Sahel - cette région désertique sub-saharienne située aux confins de l’Algérie, de la Mauritanie, du Mali, du Niger et du Tchad - comptent parmi les plus pauvres du monde.
Les pouvoirs centraux y sont généralement faibles et leurs frontières extrêmement poreuses. Depuis la chute de Mouammar Kadhfi en Lybie, les armes lourdes et légères ont ainsi afflué vers le nord du Mali, devenu un sanctuaire pour les groupes islamistes armés souvent affiliés à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). La pacification de la zone s’avère, dans ce contexte, très complexe.
La nécessité de perspectives de développement
Pour Philippe Hugon, directeur de recherche à l’Institut de recherche internationale et stratégique (Iris), la victoire contre les combattants islamistes ne se fera pas simplement à travers des conquêtes militaires : "Il faut à la fois avoir une action militaire, avoir une action humanitaire […] mais aussi toujours avoir en perspective des projets de développement, estime-t-il sur l’antenne de FRANCE 24.
Il est évident qu’une guerre contre les djihadistes ne se gagne pas uniquement du point de vue militaire, parce qu’ils connaissent le terrain, parce qu’ils ont des possibilités de se réfugier sous des tentes ou dans des grottes, et parce que de toute façon le terreau de leur action c’est à la fois le fanatisme religieux, mais c’est aussi le trafic de drogue et le fait que les jeunes ont très peu de perspectives".
Une déclaration qui fait écho à un éditorial, écrit par Dominique de Villepin, ancien ministre de la Défense, dans le "Journal du Dimanche" daté du 13 janvier. Celui qui, en 2003, avait porté devant l’ONU le veto français à la guerre en Irak estime qu’un "processus politique est seul capable d’amener la paix au Mali".
"Jamais ces guerres [contre le terrorisme] n’ont bâti un État solide et démocratique. Au contraire, elles favorisent les séparatismes, les États faillis, la loi d’airain des milices armées. Jamais ces guerres n’ont permis de venir à bout des terrorismes essaimant dans la région. Au contraire, elles légitiment les plus radicaux", poursuit l’ancien ministre, citant en exemple l’Irak, l’Afghanistan et la Libye.
Villepin pointe également du doigt le manque d'appui régional solide. "Il faut une dynamique régionale, en mobilisant l’acteur central qu’est l’Algérie et la Cédéao en faveur d’un plan de stabilisation du Sahel", préconise-t-il. Pour l'heure, Alger a exprimé son soutien "sans équivoque" aux autorités maliennes, mais il n'en demeure pas moins hostile aux interventions étrangères dans la région, a fortiori de l'ancienne puissance coloniale.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire