(Le Potentiel 02/08/2012)
Plus rien ne se décidera, désormais, sans le peuple
congolais. Ce 1er août 2012, les catholiques ont répondu par milliers à l’appel
des évêques. Les attitudes ambiguës, versatiles, hypocrites, irresponsables,
sans conviction de la classe politique frisant la complicité avérée, la marche
des catholiques est la démonstration parfaite d’un ras-le-bol de la Nation
entière déterminée à reprendre en main sondestin. Sans casse ni incident majeur,
les catholiques ont dit «Non à la balkanisation» du pays, à travers des marches
organisées dans tous les diocèses. Seuls les diocèses de Goma et Kisangani
n’auraient pas répondu à l’appel.
Joseph-Albert Malula, Patrice-Emery
Lumumba, M’zee Laurent-Désiré Kabila se retournent, certainement, de joie dans
leurs tombes. Le peuple congolais s’approprie, peu à peu, son destin. Il réécrit
l’histoire au prix des souffrances et du sang. Dans la partie orientale, le pays
est victime d’une agression du Rwanda, sème mort et désolation. Cette agression
ne fait pas de mystère sur son projet de balkanisation du pays en se donnant
pour objectif de prendre le contrôle militaire d’un pan du territoire national.
Cela fait trois mois depuis que cette nouvelle agression menée sous le
couvertd’une pseudo-rébellion dénommée Mouvement du 23 mars (M23). Dans leur
démarche, ces militaires rwandais ont un seul objectif : balkaniser la RDC.
Préoccupée, l’Eglise catholique a pris la décision de mener des actions de
lobbying afin de sensibiliser la population pour faire échec à ceux qui
cherchent à morceler le pays. La première action a été la marche d’espérance
organisée hier mercredi 1er août contre la balkanisation du pays.
La
marche de ce mercredi 1er août 2012 s’est déroulée sans incident. Dans ses
quarante-sept diocèses disséminés à travers le pays, la Conférence épiscopale
nationale du Congo (Cenco) a réussi à faire passer son message d’espérance pour
la paix et contre la guerre dans l’Est du pays, surtout contre le projet de
balkanisation de la République. C’est clair. Cette marche des fidèles
catholiques est un signal fort à tous ceux qui tirent les ficelles pour imposer
aux Congolais un plan obscur qui protège leurs intérêts mesquins. Face à une
classe politique «irresponsable, corruptible et versatile», le peuple congolais
a repris, à travers l’Eglise catholique romaine, la gestion de son
destin.
IT/Plus de 100 000 marcheurs à Kinshasa
A Kinshasa, la
marche est partie de différentes paroisses autour de 6h30, après la messe du
matin, vers les quatorze doyennés que compte l’archidiocèse de Kinshasa. Un seul
message était repris sur des banderoles de chaque paroisse : «Non à la
balkanisation de la RDC, non au pillage de nos ressources».
Bandeau
blanc à la tête, en signe de paix, bible, crucifix et chapelet en main, des
milliers de fidèles des paroisses de l’archidiocèse de Kinshasa ont réaffirmé
leur volonté de s’impliquer dans le rétablissement de la paix au Nord-Kivu, gage
de l’unité nationale. Dressés comme un seul homme, les fidèles catholiques ont
dit : «Nous voulons l’unité, la paix, l’intégrité territoriale de la RDC». Dans
leurs prières, les catholiques ont confié le pays, surtout sa partie Est, à
l’intercession de la Vierge Marie, comme aux noces de Cana où elle avait obtenu
auprès de son Fils du bon vin.
Pour la circonstance, le secrétaire
général de la Conférence nationale épiscopale du Congo (Cenco), l’abbé Leonard
Santedi, a invité toutes les personnes de bonne volonté, dont les fidèles
d’autres confessions religieuses, à les rejoindre dans la fraternité, la paix et
l’unité.
«Cette marche n’est pas pour un parti politique, c’est la marche
de l’unité du peuple congolais pour dire non à la balkanisation. Nous invitons
nos fidèles catholiques à être vigilants pour démasquer toutes les personnes qui
viendront pour perturber ou mettre le désordre», a-t-il affirmé.
Les
manifestants et autres fidèles catholiques ont été appelés à observer une minute
de silence à midi pour «penser à ceux qui ont versé de leur sang pour le pays»,
a expliqué l’abbé Santedi. A la fin de cette minute de silence, on a sonné les
cloches dans toutes les paroisses, pour nous «réveiller et bâtir un Congo uni».
Cette marche coïncide avec la présence, à Kinshasa, de la délégation de
la Commission Justice et paix des Etats-Unis qui est venue apporter un message
de réconfort à l’Eglise sœur de la RDC. Elle est organisée aussi la veille du
14ème anniversaire du début de la guerre dite d’«agression», le 2 août 1998, par
le Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD/Goma).
IT/L’accord du
gouvernement
Le ministre de l’Intérieur, Sécurité et Anciens combattants,
Richard Muyej Mangez, s’est dit très favorable à la tenue de la marche des
chrétiens catholiques contre la guerre et la balkanisation de la
RDC.
Selon lui, cette manifestation est une réponse à l’appel à la
mobilisation nationale lancé par le gouvernement contre la guerre dans l’Est du
pays. «Il est temps que nous constituons un front fort pour faire face au
complot qui se trame à l’Est de notre pays», a-t-il affirmé au sortir, la
veille, d’une réunion conjointe qui a regroupé la Cenco et les services de
sécurité.
Richard Muyej Mangez avait rassuré que des dispositions avaient
été prises pour sécuriser tous les manifestants. «J’ai demandé aux gouverneurs
d’autoriser la manifestation et de l’encadrer. Nous avons eu une séance de
travail avec les responsables de l’organisation. Et nous nous sommes convenus
sur les dispositions à prendre», a-t-il affirmé.
Effectivement la marche
s’est terminée sur une bonne note pour les éléments de la Police qui ont bien
fait leur travail d’encadrement. C’est l’une des rares fois que la police a
sécurisé une marche publique à Kinshasa sans incident.
Tout en invitant
les Congolais à participer nombreux à cette marche, le ministre Muyej avait
demandé aux «malins» de s’abstenir, assurant que le gouvernement a pris toutes
les dispositions pour «mettre hors d’état de nuire ceux qui viendront perturber
la marche ou l’instrumentaliser pour autre chose».
Selon nos reporters
déployés sur le terrain, des estimations sont de l’ordre de 200 000
manifestants. Quant au commissaire général de la police de la ville de Kinshasa,
le général Oleko, ses services estiment à 100 000 le nombre de
marcheurs.
IT/Des diocèses hors course
Selon des sources
crédibles, les diocèses de Kisangani et Goma n’auraient pas répondu à l’appel
pour des raisons diverses. «Nous n'avons pas pu organiser de marche parce que
nous ne pouvions pas contrôler les éventuels débordements des conducteurs de
motos et des enfants de la rue qui ont toujours profité des marches pour casser
des biens et voler la population», a déclaré à Goma à l'AFP un cadre de l'Eglise
catholique. A Kisangani, c’est l’autorité provinciale qui aurait interdit la
manifestation pour «n’avoir pas été informé par sa hiérarchie». A Lubumbashi,
Kalemie, Mbandaka, Matadi, Kikwit, Kananga,… des milliers de catholiques ont
marché. Les archidiocèses de Kinshasa et de Bukavu ont réalisé la plus forte
mobilisation. Sur 47 diocèses, deux à trois seulement étaient hors
course.
IT/Avec l’accord des Congolais
Une nouvelle donne vient de
s’ajouter dans l’attitude des Congolais face aux problèmes de leur pays. La
délégation du pouvoir aux gouvernants et à la classe politique ne constitue plus
un chèque à blanc. Regardant, le peuple s’implique désormais dans la recherche
des solutions aux problèmes cruciaux de la Nation entière.
Toute
initiative tendant à ignorer l’opinion publique et l’ensemble de la population
congolaise dans sa diversité est vouée à l’échec. Le ton est donné par les
catholiques, une bonne lecture des événements permettrait des anticipations. Les
Congolais, dans leur ensemble, savent ce qui constitue l’intérêt majeur du pays,
à protéger.
Les catholiques ont marché. Cependant, seul le gouvernement
peut trouver la meilleure solution pour mettre fin à la guerre.
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Potentiel
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