(Le Potentiel
22/05/2012)
A
voir l’imbroglio qui se tisse autour de l’action de l’Etat, le gouvernement
Matata est mal parti. Il brille aussi bien par des insuffisances que des
contradictions internes, apparemment monstrueuses. Au sujet de l’accord signé
entre Kigali et Kinshasa, l’on se tait et l’on parle ; l’on nie et l’on se dédit
; l’on dément et l’on reconnaît. Le jeu est tellement grossier qu’on a
l’impression de se moquer du peuple, pourtant souverain primaire de qui toutes
les institutions tirent leur pouvoir et leur légitimité.
Il aurait été de
bon ton que le gouvernement Matata s’assume comme gouvernement. Sans attendre
qu’on l’y force. Tant les griefs que les observateurs retiennent à sa charge
sont flagrants et s’accumulent à un rythme d’enfer. Aussi, serait-il trop tôt
d’exiger de ce gouvernement de rendre le tablier ?
La vérité c’est que
le Premier ministre a accepté sa charge dans un élan sentimental au point qu’il
en a fait une surprise-party. Il prend tout son temps alors que des défis
majeurs devraient être relevés en urgence, dans la mesure où ils touchent
directement au vécu quotidien du peuple congolais.
Il s’agit, entre
autres, du budget de l’Etat pour l’exercice 2012 et dont l’absence jusqu’à ce
jour traduit une navigation à vue. Du transport en commun dont la perturbation a
paralysé, le lundi 21 mai 2012, les activités à Kinshasa. De l’insécurité dans
l’Est dont le peu d’attention y accordée a ouvert la voie à une nouvelle rentrée
des forces armées rwandaises sur le sol congolais.
C’est sur ce dernier
dossier que le gouvernement a brillé par des contradictions monstrueuses. Tenez.
Le 12 mai 2012 une rencontre a eu lieu à Rubavu (Gisenyi/Rwanda) entre les
ministres de la Défense, les chefs d’Etat-major des Armées ainsi que les
responsables des services spécialisés des deux voisins. Kigali a fait part de la
rencontre tandis qu’à Kinshasa c’était motus et bouche cousue. Contacté au
téléphone par notre rédaction, le porte-parole du gouvernement a nié le fait
laissant entendre qu’il y aurait beaucoup de rumeurs.
Le 18 mai 2012,
une nouvelle rencontre a lieu, cette fois dans la capitale rwandaise et elle est
présidée par le président Paul Kagame. Kigali en fait mention et indique qu’une
forte délégation congolaise y prend part. A Kinshasa, derechef, on fait mystère
sur ce qu’ils aiment à appeler secret défense (sic !). Interrogé par notre
rédaction, le ministre Mende Omalanga a craint d’être piégé. «Il ne faut pas
piéger les membres du gouvernement», a-t-il fait remarquer au Potentiel. Comment
? Dieu seul sait. Sur notre insistance, il finira par lâcher que si nous étions
convaincus de la tenue de ladite rencontre, nous n’avions qu’à nous adresser
directement au ministre de la Défense puisqu’il était cité parmi les membres de
la délégation congolaise à Gisenyi.
L’esquive était facile. Mais les
faits étant têtus, le porte-parole a été obligé de donner de la voix et fixer
l’opinion publique qui ne savait plus à quel saint se vouer. Malheureusement,
Mende Omalanga, dans son point de presse a tenté de calmer le jeu en effleurant
le dossier sans aller dans le fond. Selon lui, la rencontre aurait bel et bien
eu lieu mais qu’elle n’aurait pas donné lieu à la signature d’un quelconque
accord sur une nouvelle opération militaire conjointe. Cela s’appelle langue de
bois, autrement dit rétention de l’information ou «parler pour ne rien dire».
Raison pour laquelle d’aucuns sont d’avis que le gouvernement n’aurait
pas encore pris le sens de ses responsabilités et se comporterait comme dans une
partie de plaisir. Et ils souhaiteraient qu’il démissionne. Quid ?
L’opinion publique a été tournée en bourrique. On a tenté de lui faire
avaler des couleuvres. Mais, la vérité est comme la lumière, elle finit toujours
par jaillir et éclater au grand jour. Alors que la presse congolaise été
court-circuitée, les médias rwandais et internationaux ont comblé le vide en
rendant public le condensé des discussions de Rubavu et de Kigali. Ils n’ont pas
utilisé le langage diplomatique pour faire état des conclusions de deux
rencontres. Il s’agit, selon ces derniers de la signature d’un accord entre
Kinshasa et Kigali pour la relance des opérations militaires conjointes ayant
pour objectif principal la traque des FDLR.
Ce qui triture les méninges
c’est la priorité accordée aux FDLR alors que les FARDC étaient engagées dans la
poursuite des mutins dirigés par Bosco Ntaganda et ses complices Makenga Sultani
et autres Kazarama Vianney devenus par le concours des circonstances ses rivaux.
Cela a tout l’air d’un marché dans lequel les priorités de Kigali priment sur
celles de Kinshasa. Suite à ce nouvel accord, les FARDC, qui étaient sur le
point de l’attraper, vont observer une trêve qui permettra au général mutin et à
ses acolytes de gagner du temps et du terrain ; de renforcer leur capacité de
nuisance.
Le péché du gouvernement ? C’est d’avoir fait de la rétention
de l’information au point de nager dans des contradictions qui ne peuvent pas
l’honorer. Or, ce que le gouvernement a tenté de déformer se retrouve en des
termes adoucis ou diplomatiques dans le communiqué final qui a sanctionné la
rencontre des 18 et 19 mai 2012 à Kigali. Laquelle fait suite à celle du 12 mai
2012 à Rubavu (Rwanda).
Communiqué final des travaux de la 5ème session
ordinaire de la Grande commission mixte Rwanda-RDC du 18 et 19 mai
2012
La délégation de la République démocratique du Congo était conduite
par Son Excellence Monsieur Raymond Tshibanda N’Tungamulongo, ministre des
Affaires étrangères, Coopération internationale et de la Francophonie, tandis
que la délégation de la République du Rwanda était conduite par Son Excellence
Madame Louise Mushikiwabo, Ministre des Affaires étrangères et de la
Coopération.
La cérémonie d’ouverture a été marquée par l’allocution de
bienvenue de madame Louise Mushikiwabo, ministre Rwandais des Affaires
étrangères et de la Coopération et celle de Monsieur Raymond Tshibanda
N’Tungamulongo ministre des Affaires Etrangères, Coopération internationale et
de la Francophonie.
Les deux parties se sont félicitées de l’excellence
des relations qui existent entre la République démocratique du Congo et la
République du Rwanda ainsi qu’entre leurs deux peuples qui reflète la volonté
manifeste de deux Chefs d’Etat, Leurs Excellentes Paul Kagame et Joseph Kabila,
de faire de la région des Grands Lacs un havre de paix, de stabilité et de
développement durables.
Les deux parties ont noté avec satisfaction les
efforts fournis pour mettre en application les recommandations de la 4ème
Session la Grande Commission mixte entre la République démocratique du Congo et
la République du Rwanda tenue à Kinshasa du 17 au 19 décembre 2009.
Les
deux parties ont recommandé de poursuivre les efforts pour l’aboutissement des
projets et programmes communs pour l’intérêt des peuples Congolais et Rwandais.
Concernant la question de sécurité, les deux parties réitèrent leur
engagement à œuvrer de concert pour mettre fin à l’existence des groupes armés
dans la région.
Par ailleurs, elles s’engagent à saisir et encourager
tous les pays, notamment ceux de la région où se trouvent encore les Fdlr et les
autres forces négatives ainsi que des éléments opportunistes en vue de leur
neutralisation.
Sur cette même question, les deux parties ont vivement
encouragé la poursuite des rencontres régulières au niveau des ministres de la
Défense, des chefs d’état-major des Armées ainsi que des services spécialisés à
l’instar de la récente rencontre de Rubavu du 12 mai 2012 pour l’évaluation de
la situation sécuritaire entre les deux pays.
Elles saluent, soutiennent
sans réserve et recommandent la mise en ouvre rapide et effectives des
conclusions adoptées par les ministres de la Défense de la République du Rwanda
et de la République démocratique du Congo lors de leur dernière rencontre
fructueuse à Gisenyi, Rubavu, le 12 mai 2012 :
Les ministres de la
Défense ont convenu d’étendre le mandat de la Commission conjointe des
renseignements à la vérification conjointe de la situation sécuritaire le long
des frontières ainsi qu’à l’intérieur de chaque pays. Les Chefs d’état-major des
services des renseignements des deux pays vérifieront l’efficacité de ce
mécanisme dans les 10 jours.
Dans les dix jours, les deux chefs
d’état-major Généraux présenteront un plan concerté pour les opérations contre
les FDLR. Le plan comprendra notamment un mécanisme conjoint de monitoring de
ces opérations.
Endéans dix jours, les Chefs de services de
renseignements sont chargés de mettre sur pieds un mécanisme de prévention de
toute action nuisible aux bonnes relations, et à la sécurité des deux Etats,
notamment par des éléments opportunistes et la propagande négative. Le
Gouvernement de la RDC s’engage à créer des conditions favorables au retour le
plus vite possible dans leurs milieux d’origine des personnes affectées par les
opérations récentes.
Le Gouvernement du Rwanda continuera à appuyer les
efforts de la RDC visant à restaurer et maintenir la paix et la sécurité à l’Est
de la RDC.
S’agissant du domaine des réfugiés, les deux parties ont
recommandé la poursuite de la sensibilisation des réfugiés de deux pays pour
leur retour volontaire dans les meilleurs délais. Par ailleurs, les deux parties
ont appris avec satisfaction la tenue à Kigali en juillet 2012 de la deuxième
réunion tripartite HCR-RDC-RWANDA sur la question des réfugiés.
Quant au
domaine de la circulation des personnes et des biens, les deux parties ont salué
les avancées significatives pour la facilitation de la circulation des personnes
et du commerce transfrontalier.
Pour différents autres domaines liés au
développement socioéconomique entre les deux pays, les deux parties ont
recommandé la poursuite des efforts déjà entrepris en vue de leur mise en
application dans les meilleurs délais.
Les deux parties ont convenu de
la tenue de la 6ème session de la Grande Commission Mixte en République
démocratique du Congo au mois de mais 2013.
Les travaux se sont déroulés
dans une ambiance fraternelle et de convivialité.
Fait à Kigali, le 19
mai 2012
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Potentiel
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