RDC: tension à Kinshasa pour la «journée de la colère», des interpellations
Journée tendue en RDC ce jeudi 30 novembre. L'opposition avait appelé à braver l'interdiction de manifester dans plusieurs villes du pays. Pas de bilan officiel pour le moment, mais de nombreuses interpellations ont été signalées dans le pays. A Kinshasa, trois leaders du Rassemblement, Jean-Marc Kabund, Martin Fayulu et Jean-Bertrand Ewanga ont été interpellés alors qu'ils tentaient de marcher et rejoindre leurs militants. Ils ont été relâchés dans l'après-midi, selon la police. Des militants seraient toujours retenus. On ignore combien. La police parle de « voyous » qui tentaient de perturber l'ordre public.
►Le déroulé de la journée à Kinshasa
Le chef de la police à Kinshasa, le général Sylvano Kasongo, a confirmé l'interpellation d'une dizaine de membres du Rassemblement : ils ont été transférés au commissariat de Limete pour y être entendus. Il leur est reproché d'avoir bravé l'interdiction de manifester. Par ailleurs, quatre cocktails Molotov ont été saisis, selon la police. Une information que ne confirment pas les témoins.
Jean-Marc Kabund, Martin Fayulu et Jean-Bertrand Ewanga, du Rassemblement de l'opposition (Rassop), ont été libérés ce jeudi après-midi, a indiqué le chef de la police kinoise.
A la mi-journée, Jean-Marc Kabund, secrétaire général de l'UDPS, et Martin Fayulu, responsable de la mobilisation au sein du Rassemblement de l'opposition (Rassop), se préparaient à rejoindre la « marche de la colère » – interdite à Kinshasa – à laquelle l'opposition avait appelé. Mais ils ont eu à peine le temps de faire cinquante mètres avant que la police intervienne, brutalement. Martin Fayulu a ainsi été traîné dans une Jeep de la police de couleur noire. Plusieurs cadres de l'UDPS ont également été embarqués.
Plus tôt dans la matinée, Martin Fayulu avait reçu RFI et avait raconté comment la police avait, à plusieurs reprises, tenté de le dissuader de rejoindre la marche. « Ces militaires et policiers qui sont postés ici essaient de nous agresser. Ils ont essayé d'entrer pour faire sortir tout le monde. Ils sont dehors et on se regarde en chiens de faïence ! »
Ecoutez ce que nous racontait Martin Fayulu avant son interpellation
Félix Tshisekedi, le président du Rassemblement, n'a pas pu sortir de chez lui. Les militants qui s'étaient rassemblés ce matin pour l'attendre devant son domicile ont été dispersés à coups de gaz lacrymogène, tandis qu'il était retenu à l'intérieur.
«Nous voulons des élections ! Nous voulons une transition»: paroles recueillies devant le domicile de Félix Tshisekedi
►Des incidents à l'intérieur du pays
Des blessés, des arrestations et des enlèvements ont par ailleurs été signalés dans plusieurs villes du pays. A Goma, Béni, Mbuji-Mayi, Kananga, Lubumbashi, la police a violemment réprimé des manifestants qui tentaient de descendre dans la rue. Des barricades ont été érigées sur les routes et des pneus brûlés sur la chaussée.
Plusieurs sources signalent également des arrestations de manifestants et leur détention en lieu secret. A Mbuji-Mayi, le porte-parole du Rassop John Mbombo, retrouvé poignardé ce jeudi matin dans un ravin, est détenu à l’état-major de la police, selon une source sur place. D’autres responsables de l’opposition ont également été interpellés dans cette ville et ailleurs.
A Kasindi, dans le Nord-Kivu, des témoins rapportent l’arrestation de quatre militants de Lucha. A Lubumbashi, déjà ce mercredi en début de soirée, le secrétaire fédéral du parti d’opposition Unadef a été enlevé et amené vers une destination inconnue. Répression aussi à Uvira et Bukavu, dans le Sud-Kivu, des manifestations organisées par les femmes membres du Rassemblement des forces acquises au changement avec la participation des organisations de la société civile.
►L'opposition « satisfaite » de la mobilisation, la majorité parle d'échec
Finalement, la marche annoncée par le Rassemblement pour réclamer le départ du président Kabila n'a pas pu avoir lieu. Mais ce jeudi soir, l'opposition se dit « satisfaite » de la mobilisation. Globalement, l'activité a été très ralentie dans la capitale Kinshasa.
Mais du côté de la majorité, on estime que c'est la peur et la sagesse qui ont poussé les Kinois à rester chez eux. Pour Dounia Kilanga, secrétaire permanent du PPRD, le parti de la majorité présidentielle à Kinshasa, la marche de l'opposition a échoué. Il déplore que contrairement à son parti, le Rassemblement ne se soit pas plié à l'interdiction de manifester. Rappelons que la majorité présidentielle avait annoncé une marche le 28, poussant le gouverneur à interdire toutes les marches à Kinshasa cette semaine en invoquant des raisons de sécurité.