Des soldats français débarquent avec leur équipement d'un C-17 prêté par les Etats-Unis, le 22 janvier 2013.
REUTERS/Eric Gaillard
Plus de 3 000 militaires français sont déjà engagés dans le cadre de l'opération Serval au Mali. Equipement, armement, logistique... Le déploiement des forces françaises va faire exploser le budget dédié aux opérations extérieures. Salée, la facture le sera, c'est sûr. La France a-t-elle les moyens de financer cette guerre ? Pourra-t-elle compter sur ses alliés pour la soutenir ?
Quels sont les moyens déployés au Mali ?
Lundi, 3 150 militaires français étaient engagés dans l’opération Serval, lancée le 11 janvier, dont 2 150 sur le sol malien. Un chiffre qui devrait rapidement atteindre voire dépasser les 2 500 hommes.
Côté matériel, selon le blog Secret Défense, au moins douze avions de combat sont actuellement déployés : six Mirage 2000 et quatre Rafale ainsi que deux Mirage F1CR. Cinq avions ravitailleurs C-135 FR sont également engagés sur les quatorze que compte l’armée française, cinq avions de transport tactique C-160 Transall et C-130 Hercules. Plusieurs Atlantique 2 de la Marine, basés à Dakar, sont quant à eux engagés dans des missions de recueil de renseignements optiques et d'écoutes. L’armée dispose aussi d’une vingtaine d'hélicoptères dont des Tigre et des Gazelle (l’un d’eux a d’ailleurs déjà été détruit lors des combats, un autre est endommagé). Les deux drones Harfang de l'armée de l'Air sont aussi sur place, bien qu'en bout de course après trois ans de service et 5 000 heures de vol en Afghanistan.
Combien cette guerre coûte-t-elle à la France ?
Douze jours après le début de l'intervention, mercredi 23 janvier, le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian a estimé à:
« 30 millions d'euros » le coût de l'opération française.
« On peut considérer que l'opération la plus coûteuse pour nous jusqu'à présent a été l'opération logistique, le transport », a-t-il déclaré lors de l'émission « Politiques », de France24-L'Express-RFI. Se livrer à des pronostics pour la suite serait hasardeux. Tout dépendra, expliquent les experts, des moyens engagés, de l’intensité des combats et surtout, de la durée de l’opération, la grande inconnue de cette affaire.
Les opérations militaires récentes fournissent des points de comparaison. Se basant sur les coûts de l’intervention libyenne de 2012, une agence de presse estimait il y a quelques jours que l’intervention malienne se monterait à 400 000 euros par jour. D’autres estimations tablent, elles, sur un million d’euros par jour.
En Afghanistan, la présence militaire française a coûté 493 millions d’euros en 2012, soit 1,4 million d’euros par jour. Une facture qui s’explique par l’éloignement et le fait que la France ne disposait pas de bases dans la région.
A la différence, une grande partie des militaires engagés au Mali étaient déjà positionnés dans des bases en Afrique, au Tchad dans le cadre de l’opération Epervier, en République centrafricaine et en Côte d’Ivoire.
Leur présence hors de France n'entraîne pas de dépenses supplémentaires par rapport au budget d'origine de la Défense.
En Libye, l’opération Harmattan avait nécessité 368,5 millions d’euros en 2011, soit 1,7 million d’euros par jour. Rappelons que cette intervention avait impliqué l’envoi d’un groupe aéronaval de Toulon au large des côtes libyennes durant sept mois. A titre de comparaison, 4 000 hommes étaient impliqués ainsi que 31 avions en tout.
Pour se faire une idée du prix total de la guerre, il faut prendre en compte le coût d’un soldat en opération qui gagne 50% de plus en mission, sachant qu’un militaire français est payé au SMIC.
Le coût de fonctionnement du matériel : on sait, par exemple, que l’heure de vol d’un Rafale était estimée à 26 800 euros en 2010, selon le rapport budgétaire du député PS Jean Launay d’octobre 2012.
Le coût horaire d’un Mirage 2 000 à 11 700 euros. Celui d’un hélicoptère Tigre à 25 100 euros, contre 2 600 euros seulement pour un Gazelle. A quoi il faut ajouter le coût des munitions et celui de la logistique. Déployer tout ce matériel coûte cher, d’autant que le Mali est un pays enclavé et que la France ne dispose pas d’avion gros porteur. Mais ses partenaires ont fait savoir qu’ils allaient lui prêter des avions C-17 pour transporter le matériel sur le théâtre des opérations. De quoi permettre quelques économies.
Qui paiera la facture ?
Confrontée à une grave crise économique, la France a-t-elle aujourd’hui les moyens de financer la guerre ? La question est posée de manière insistante dans les médias, mais aussi par les contribuables qui craignent de voir leur feuille d’impôt s’alourdir.
Quel que soit le coût, Paris paiera. Rappelons que les opérations extérieures militaires (Opex) sont budgétées tous les ans dans la loi des finances de l'Etat français, même si comme le quotidien Le Monde le rappelle, ce budget est régulièrement dépassé et réapprovisionné sur un fonds de prévention interministériel afin de pouvoir payer les surcoûts. C’est sans doute ce qui risque de se passer cette année si le coût total de l’opération française au Mali dépasse les 630 millions d’euros dédiés aux Opex dans le budget 2013 (sur un budget de près de 32 milliards au total pour la Défense) !
Sauf si l’Union Européenne ou… les Etats du Golfe décident de prendre en charge en partie le coût de l’effort militaire de la France contre les réseaux jihadistes au Mali. Lors de sa récente visite à Abou Dhabi, le président Hollande a lancé un appel dans ce sens aux gouvernements des riches Emirats arabes du Moyen-Orient.
Comment sera financé le déploiement des troupes africaines au Mali ?
Conformément à la résolution 2085 adoptée à l’unanimité par le Conseil de Sécurité de l’ONU, la Cédéao a commencé à déployer des troupes africaines au Mali pour venir en aide aux militaires français de l’opération Serval et à l’armée malienne. Ces troupes africaines proviennent essentiellement du Niger, du Nigeria, du Burkina Faso, du Togo et du Tchad. Cette Mission internationale de soutien au Mali, communément connue par son acronyme la « Misma », comptera à terme 5 800 hommes. Elle est dirigée par le général nigérian Shehu Abdulkadir. Quelque 2 000 membres de la Misma doivent être déployés d’ici au 26 janvier.
Selon le Quai d’Orsay, les besoins financiers pour la formation de l’armée malienne et le déploiement des troupes africaines ont été estimés à 340 millions d’euros, soit 150 milliards de francs CFA.
Deux fonds ont été créés, l’un pour les forces armées maliennes et le second destiné à financer la force d’intervention africaine. L’Union européenne s’est engagée à participer à ces fonds à hauteur de 50 millions d’euros. Les conditions d’assistance européenne et internationale seront connues lors de la réunion des donateurs de la Misma qui se tiendra le 29 janvier à Addis-Abeba, en marge du sommet de l’Union africaine. Il n’est pas exclu que les pays africains riches tels que l’Afrique du Sud et l’Angola soient mis à contribution.
Qu’en est-il des Américains et des autres alliés traditionnels de la France ?
Malgré les apparences, la France n’est pas seule au Mali, son action est soutenue par ses alliés traditionnels. Mais ce soutien reste limité à des assistances logistiques. Si l’Allemagne reste floue sur la nature concrète de son soutien à l’allié français, le Royaume-Uni, tout comme la Belgique, le Canada et les Etats-Unis aident la France à transporter ses troupes et ses équipements vers le Mali.
Londres a mis deux gros porteurs militaires C-17 à la disposition de l’armée française. La Belgique participe à l’opération Serval avec deux avions de transport C-130 Hercules et deux hélicoptères d’évacuation sanitaire. Cette mission mobilise 80 militaires belges qui ne participeront pas toutefois aux opérations de combat. L’Italie, pour sa part, s’est dite prête à fournir un soutien logistique pour les opérations aériennes. Quant à Washington, elle partage avec Paris les informations provenant de ses observations effectuées via des satellites et des drones non-armés. En principe, le coût de ces missions d’assistance est pris en charge par le budget de la défense des pays concernés.
Les alliés traditionnels de la France ont pour l’instant écarté l’idée d’envoyer des troupes au Mali en soutien à la France, même si le chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton semble encore croire qu’un soutien militaire des Européens à terme n’est pas à exclure. L’UE a proposé d’organiser une réunion internationale sur le Mali le 5 février à Bruxelles.
Lundi, 3 150 militaires français étaient engagés dans l’opération Serval, lancée le 11 janvier, dont 2 150 sur le sol malien. Un chiffre qui devrait rapidement atteindre voire dépasser les 2 500 hommes.
Côté matériel, selon le blog Secret Défense, au moins douze avions de combat sont actuellement déployés : six Mirage 2000 et quatre Rafale ainsi que deux Mirage F1CR. Cinq avions ravitailleurs C-135 FR sont également engagés sur les quatorze que compte l’armée française, cinq avions de transport tactique C-160 Transall et C-130 Hercules. Plusieurs Atlantique 2 de la Marine, basés à Dakar, sont quant à eux engagés dans des missions de recueil de renseignements optiques et d'écoutes. L’armée dispose aussi d’une vingtaine d'hélicoptères dont des Tigre et des Gazelle (l’un d’eux a d’ailleurs déjà été détruit lors des combats, un autre est endommagé). Les deux drones Harfang de l'armée de l'Air sont aussi sur place, bien qu'en bout de course après trois ans de service et 5 000 heures de vol en Afghanistan.
Combien cette guerre coûte-t-elle à la France ?
Douze jours après le début de l'intervention, mercredi 23 janvier, le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian a estimé à:
« 30 millions d'euros » le coût de l'opération française.
« On peut considérer que l'opération la plus coûteuse pour nous jusqu'à présent a été l'opération logistique, le transport », a-t-il déclaré lors de l'émission « Politiques », de France24-L'Express-RFI. Se livrer à des pronostics pour la suite serait hasardeux. Tout dépendra, expliquent les experts, des moyens engagés, de l’intensité des combats et surtout, de la durée de l’opération, la grande inconnue de cette affaire.
Les opérations militaires récentes fournissent des points de comparaison. Se basant sur les coûts de l’intervention libyenne de 2012, une agence de presse estimait il y a quelques jours que l’intervention malienne se monterait à 400 000 euros par jour. D’autres estimations tablent, elles, sur un million d’euros par jour.
A la différence, une grande partie des militaires engagés au Mali étaient déjà positionnés dans des bases en Afrique, au Tchad dans le cadre de l’opération Epervier, en République centrafricaine et en Côte d’Ivoire.
Leur présence hors de France n'entraîne pas de dépenses supplémentaires par rapport au budget d'origine de la Défense.
En Libye, l’opération Harmattan avait nécessité 368,5 millions d’euros en 2011, soit 1,7 million d’euros par jour. Rappelons que cette intervention avait impliqué l’envoi d’un groupe aéronaval de Toulon au large des côtes libyennes durant sept mois. A titre de comparaison, 4 000 hommes étaient impliqués ainsi que 31 avions en tout.
Pour se faire une idée du prix total de la guerre, il faut prendre en compte le coût d’un soldat en opération qui gagne 50% de plus en mission, sachant qu’un militaire français est payé au SMIC.
Le coût de fonctionnement du matériel : on sait, par exemple, que l’heure de vol d’un Rafale était estimée à 26 800 euros en 2010, selon le rapport budgétaire du député PS Jean Launay d’octobre 2012.
Le coût horaire d’un Mirage 2 000 à 11 700 euros. Celui d’un hélicoptère Tigre à 25 100 euros, contre 2 600 euros seulement pour un Gazelle. A quoi il faut ajouter le coût des munitions et celui de la logistique. Déployer tout ce matériel coûte cher, d’autant que le Mali est un pays enclavé et que la France ne dispose pas d’avion gros porteur. Mais ses partenaires ont fait savoir qu’ils allaient lui prêter des avions C-17 pour transporter le matériel sur le théâtre des opérations. De quoi permettre quelques économies.
Qui paiera la facture ?
Confrontée à une grave crise économique, la France a-t-elle aujourd’hui les moyens de financer la guerre ? La question est posée de manière insistante dans les médias, mais aussi par les contribuables qui craignent de voir leur feuille d’impôt s’alourdir.
Quel que soit le coût, Paris paiera. Rappelons que les opérations extérieures militaires (Opex) sont budgétées tous les ans dans la loi des finances de l'Etat français, même si comme le quotidien Le Monde le rappelle, ce budget est régulièrement dépassé et réapprovisionné sur un fonds de prévention interministériel afin de pouvoir payer les surcoûts. C’est sans doute ce qui risque de se passer cette année si le coût total de l’opération française au Mali dépasse les 630 millions d’euros dédiés aux Opex dans le budget 2013 (sur un budget de près de 32 milliards au total pour la Défense) !
Sauf si l’Union Européenne ou… les Etats du Golfe décident de prendre en charge en partie le coût de l’effort militaire de la France contre les réseaux jihadistes au Mali. Lors de sa récente visite à Abou Dhabi, le président Hollande a lancé un appel dans ce sens aux gouvernements des riches Emirats arabes du Moyen-Orient.
Comment sera financé le déploiement des troupes africaines au Mali ?
Conformément à la résolution 2085 adoptée à l’unanimité par le Conseil de Sécurité de l’ONU, la Cédéao a commencé à déployer des troupes africaines au Mali pour venir en aide aux militaires français de l’opération Serval et à l’armée malienne. Ces troupes africaines proviennent essentiellement du Niger, du Nigeria, du Burkina Faso, du Togo et du Tchad. Cette Mission internationale de soutien au Mali, communément connue par son acronyme la « Misma », comptera à terme 5 800 hommes. Elle est dirigée par le général nigérian Shehu Abdulkadir. Quelque 2 000 membres de la Misma doivent être déployés d’ici au 26 janvier.
Deux fonds ont été créés, l’un pour les forces armées maliennes et le second destiné à financer la force d’intervention africaine. L’Union européenne s’est engagée à participer à ces fonds à hauteur de 50 millions d’euros. Les conditions d’assistance européenne et internationale seront connues lors de la réunion des donateurs de la Misma qui se tiendra le 29 janvier à Addis-Abeba, en marge du sommet de l’Union africaine. Il n’est pas exclu que les pays africains riches tels que l’Afrique du Sud et l’Angola soient mis à contribution.
Qu’en est-il des Américains et des autres alliés traditionnels de la France ?
Malgré les apparences, la France n’est pas seule au Mali, son action est soutenue par ses alliés traditionnels. Mais ce soutien reste limité à des assistances logistiques. Si l’Allemagne reste floue sur la nature concrète de son soutien à l’allié français, le Royaume-Uni, tout comme la Belgique, le Canada et les Etats-Unis aident la France à transporter ses troupes et ses équipements vers le Mali.
Londres a mis deux gros porteurs militaires C-17 à la disposition de l’armée française. La Belgique participe à l’opération Serval avec deux avions de transport C-130 Hercules et deux hélicoptères d’évacuation sanitaire. Cette mission mobilise 80 militaires belges qui ne participeront pas toutefois aux opérations de combat. L’Italie, pour sa part, s’est dite prête à fournir un soutien logistique pour les opérations aériennes. Quant à Washington, elle partage avec Paris les informations provenant de ses observations effectuées via des satellites et des drones non-armés. En principe, le coût de ces missions d’assistance est pris en charge par le budget de la défense des pays concernés.
Les alliés traditionnels de la France ont pour l’instant écarté l’idée d’envoyer des troupes au Mali en soutien à la France, même si le chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton semble encore croire qu’un soutien militaire des Européens à terme n’est pas à exclure. L’UE a proposé d’organiser une réunion internationale sur le Mali le 5 février à Bruxelles.
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