Kinshasa, 19/01/2013 /
Politique
Revoici le Rwanda qui cherche une fois de plus à infiltrer l’armée de la RDC aux
négociations de Kampala comme cela se répétait depuis l’AFDL, le RCD et le CNDP,
ce qui est la cause du sempiternel noyautage des FARDC dès lors affaiblies à
jamais devant toute faction rebelle ou pacotille de
terroriste
Kabarebe et son équipe |
«Chassez le naturel, il revient au galop », renseigne un adage populaire.
En RDC,
à chaque négociation d’un accord de paix correspond un nouveau processus
d’intégration et de brassage au sein des forces armées et de la police.
Comme à
Sun City en 2002 et à Goma en 2009, le M23, poussé par son parrain, le Rwanda,
réclame aussi le même traitement.
Les revendications du M23 tiennent à un schéma
savamment concocté par Kigali. Il s’agit de fragiliser la RDC en infiltrant son
système de défense et de sécurité.
Les pourparlers directs engagés à Kampala (Ouganda) entre le gouvernement de
Kinshasa et le M23 battent de l’aile, malgré l’adoption de son ordre du jour. Le
mercredi 16 janvier 2013, la délégation du M23 a clairement étalé ses ambitions
qui consistent, entre autres, à faire table rase de l’ordre institutionnel
existant. 24 heures plus tard, soit le jeudi 17 janvier, Kinshasa a répondu au
M23, sans toutefois s’engager dans une polémique.
Le Rwanda jouant désormais à
visage découvert, à savoir par le truchement du M23, les nuages se dissipent de
plus en plus sur les vrais enjeux du dialogue de
Kampala.
A y
regarder de près, l’on découvre le fil conducteur de ce feuilleton dont les
rebondissements sont toujours précédés par la survenance d’un événement
malheureux sur le territoire congolais ou à la frontière avec l’un de ses
voisins burundais, ougandais ou rwandais. Sans remonter trop loin dans le temps,
l’on choisit au hasard un point de repère.
L’échec de
l’aventure de l’AFDL donne lieu à la création du RCD. L’idéologie rwandaise
étant toujours mal comprise par les adhérents congolais, une phagocytose se
déclare tout de suite. Et l’on assiste à un écumage de groupes armés dont les
racines se retrouvent soit à Kigali, soit à Kampala. L’ampleur prise par les
événements recommande que tous les acteurs impliqués dans la crise congolaise se
concertent afin de trouver des pistes de sortie de crise. Finalement, c’est la
formule « dialogue intercongolais » qui est retenue et le cadre choisi pour
abriter les assises c’est Sun City, en Afrique du Sud.
A l’issue
des discussions, il est convenu un partage de responsabilités dans toutes les
institutions du pays entre belligérants. Pour y arriver, une formule sui generis
est trouvée : un gouvernement 1+4 est imaginé pour diriger le Congo durant une
période dite de transition démocratique. Le processus électoral enclenché à la
fin de la fameuse transition n’arrive pas à contenter tous les anciens
protagonistes.
Comme en
2002 en Afrique du Sud, une autre rencontre est organisée en 2009 à Goma entre
le nouveau pouvoir à Kinshasa et les transfuges du RCD, devenus pour la
circonstance CNDP (Congrès national pour la défense du peuple), principalement ;
même si, pour des raisons de décor, les autres groupes armés (Maï-Maï et autres
assimilés disséminés dans l’Est) sont associés aux discussions qui débouchent
sur un accord dit du 23 mars 2009. Il est signé à cette date dans la ville de
Goma (Nord-Kivu) par tous les belligérants enregistrés et invités au motif de
sauver le processus démocratique et électoral.
Que nenni.
Puisque le venin a été inoculé dès le départ, c’est-à-dire dès la conception du
projet macabre de partition du Congo, l’accord de Goma tourne court. Insatisfait
de l’échec de l’expérience malheureuse de mixage, le CNDP se mue en M23
(Mouvement du 23 mars 2009). La dénomination dénote tout le programme dont le
nouveau groupe armé est chargé. A Kinshasa, on a mis du temps pour décrypter le
système mis en route par Kigali. Raison pour laquelle, on en est arrivé aux
pourparlers de Kampala.
Qu’est-ce
que le gouvernement devrait décoder ? C’est la trame choisie. Kigali a beau être
fin, subtil, et coriace dans son entreprise de déstabilisation du Congo mais il
a un péché mignon. Il garde son procédé. Il sélectionne des Congolais, les place
ou les infiltre (c’est selon) dans les institutions de la RDC. Dès qu’il se rend
compte que ces derniers ne respectent pas le cahier des charges leur confié, il
se trouve dans l’obligation de les changer. Quand ceux-ci rechignent, il en
sélectionne d’autres après avoir créé une situation de conflit.
Pour
retrouver ce fil conducteur dont nous avons parlé au début, prenez les faits
saillants qui sortent du lot dans les discussions en cours dans la capitale
ougandaise. Aux dernières nouvelles, il nous revient que le M23 est revenu sur
le brassage de ses troupes dans les FARDC et l’intégration des membres de sa
branche politique dans toutes les institutions du pays. C’est ce qui ressort de
sa déclaration du 16 janvier 2013 à Kampala. Il exprime la nécessité de « la
réforme de l’Armée nationale et la reconnaissance formelle des grades actualisés
des militaires du M23 ».
Il attend
voir, au terme des pourparlers, se mettre en place « un mécanisme de
fidélisation des troupes de l’Armée révolutionnaire congolaise, ARC en sigle,
dans le processus d’intégration au sein de l’Armée nationale ». Autrement dit,
il est encore et toujours question de remise en cause du cadre institutionnel de
la RDC chaque fois qu’il est question de parler sortie de crise. Cela pue, à
mille lieues, la main noire de Kigali qui tient toujours, à défaut de morceler
le Congo, du moins garder un pied sur le territoire congolais et contrôler les
institutions de la République.
Kampala sur les
traces de Sun City et Goma
Dès la
signature de l’accord du 23 mars 2009, de nombreuses unités issues de différents
groupes armés ont été automatiquement intégrés dans les FARDC, avec
reconnaissance automatique des grades qu’ils portaient au sein de leurs
mouvements respectifs. C’est à ce titre d’ailleurs que Bosco Ntaganda a été
revêtu de son grade de général. Sultani Makenga a été fait colonel au nom du
même principe.
Dans le
fond, tout est mis en place pour affaiblir davantage Kinshasa. La meilleure
façon de fragiliser la RDC est la reconstitution de manière hasardeuse de
l’armée congolaise qui a perdu toute son homogénéité, alors qu’il devait en être
le cas. Dans le fait, l’armée congolaise n’est qu’un assemblage des unités
disparates. C’est un colmatage de différentes milices. Kampala est sur le schéma
de Sun City.
Erreur de
conceptualisation
Jean-Jacques Wondo, auteur d’un ouvrage récent retraçant l'histoire des armées en
République démocratique du Congo, a de bonnes raisons de dire qu’« en RDC, les milices ont remplacé l’armée ». Dans son
ouvrage, l’auteur pointe du doigt les nombreux dysfonctionnements des forces de
sécurité : manque de leadership politique, soldes insuffisantes, carence de
formation, intégration ratée des rebelles, règne des milices
…
Concernant les opérations d’intégration et de brassage, maintes
fois expérimentées en RDC, Jean-Jacques Wondo, qui reconnaît que « le brassage a
été une des pistes de solutions, mais pas la solution miracle », pense cependant
que le brassage a souffert au départ d'un défaut de « conceptualisation ». « Au
moment de derniers accords de paix (en 2009, Ndlr), il fallait satisfaire tout
le monde, rebelles et gouvernement. A un moment, le gouvernement est sorti de la
logique du brassage pour passer à la logique de régiments. Le CNDP (les rebelles
de l'époque, Ndlr) n'a pas voulu être mélangé avec les autres unités »,
soutient-il.
Loin de
résoudre des problèmes, le brassage, l’intégration et, plus tard, le mixage
n’ont fait que multiplier les frustrations. C’est la résultante de toutes ces
frustrations qui justifient les guerres à répétition dans l’Est du pays. C’est
aussi de ces mêmes frustrations qu’est né le M23. Y a-t-il encore une raison,
alors que Kinshasa et le M23 tentent d’aplanir leurs divergences à Kampala
d’emprunter la même voie ; celle qui a montré ses limites sur toute la ligne.
Kinshasa a de bonnes raisons de se ressaisir.
Le dialogue
de Kampala ne doit pas servir d’occasion de récompenser ceux qui ont tué,
massacré et semé la désolation parmi les populations de l’Est du pays. Tout doit
être mis en œuvre pour sortir de ce cercle vicieux créé depuis le dialogue de
Sun City en 2002. Kigali est resté dans sa logique, celle de balkaniser la RDC
en se faisant passer pour incontournable dans la résolution de la crise en RDC,
Kinshasa ferait mieux de trouver la sienne et s’y accrocher. Illustration :
rompre définitivement avec ces solutions imposées et qui s’avèrent toujours
inadéquates.
Le Potentiel
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