(Guineeconakry.info 15/10/2012)
Le 14ème sommet de la Francophonie s’est achevé hier dans la
capitale de la République Démocratique du Congo. Pendant deux jours, Kinshasa
aura réuni quelques 26 chefs d’Etat et de gouvernement et de nombreux autres
représentants des 57 pays ayant en partage la langue de Molière.
Au
final, la rencontre a produit des résolutions sur le conflit au Nord-Kivi, la
crise malienne, la situation politique en Guinée Bissau et au Madagascar ainsi
que par rapport à la piraterie sur le Golfe de Guinée. De même, le sommet a
réitéré l’indispensable nécessité d’impliquer le continent africain dans les
grandes instances de décision mondiales telles l’ONU. Mais à côté de tous ces
sujets, c’est "la bataille" entre les présidents français François Hollandais et
congolais, Joseph Kabila, qui aura véritablement marqué cet autre rendez-vous de
la Francophonie.
Beaucoup pouvaient déjà se faire une idée de la tension
qui allait régner entre François Hollande et Joseph Kabila. En effet, avant même
d’atterrir à Kinshasa, le président français avait donné le ton en déclarant que
"la situation des droits de l’homme, de la démocratie et de la reconnaissance de
l’opposition en RDC était inacceptable".
On se rappelle qu’à Kinshasa,
ces propos, très peu diplomatiques, n’avaient pas été appréciés. C’est le moins
qu’on puisse dire. Bien que les sorties fracassantes aient été soigneusement
évitées de part et d’autre, les gestes qui ont été posés et les discours tenus
étaient fortement chargés de cette tension. A commencer par la rencontre les
deux présidents, juste après l’arrivée de François Hollande, le samedi 13
octobre. Certes, l’entretien qui a duré trois quart d’heure s’est déroulé à huis
clos. Mais selon certaines indiscrétions, tout en y mettant la manière, François
Hollande aurait exposé son insatisfaction en ce qui concerne les droits humains
et la démocratie en RDC.
Touché dans son orgueil de président d’un pays
souverain, Joseph Kabila aurait écouté et surtout répondu avec une pointe
d’agacement. D’ailleurs, cet agacement, il l’a clairement exprimé lors de la
conférence de presse finale en déclarant que son pays n’avait aucun "complexe"
ou en indiquant le choix de la démocratie était une option de "conviction" et
non de "contrainte". La seule chose sur laquelle les deux chefs d’Etat avaient
une identité de vue, c’est bien le conflit à l’est du pays. Mais même à ce
niveau, le président congolais aurait manifesté son regret que la France n’ait
pas poussé sa condamnation jusqu’à citer nommément le Rwanda comme soutien des
rebelles du M23 !
Le caractère tendu de cette rencontre, on
l’aura notamment remarqué avec la poignée de main plutôt sèche et rapide entre
les deux présidents lors de la cérémonie d’ouverture du sommet. Outre les mots
qui fâchent, François Hollande aura également posé des actes qui sont de nature
à irriter le pouvoir congolais. C’est ainsi qu’il a non seulement reçu des
leaders de l’opposition congolaise dont Etienne Tshisekedi, mais aussi des
animateurs d’ONG de défense des droits humains. De même, il a inauguré une
médiathèque dédiée à Floribert Chebeya, du nom de l’ex-président de l’ONG "La
Voix des sans voix" assassiné en 2010. Cet acte est l’expression du désaccord du
président français face à la tournure que commence à prendre le procès contre
les présumés assassins de Floribert Chebeya.
Sur le même registre du
climat tendu entre les deux chefs d’Etat, il faut ajouter le retour précipité du
numéro un français. Si les enjeux économiques et stratégiques se rattachant à la
RDC l’auront contraint à aller en RDC, il n’entendait pas s’éterniser dans un
pays où les droits humains et la démocratie sont bafoués.
Pour sa part,
le président Joseph Kabila, pour manifester son mécontentement, n’a pas voulu
serrer, dit-on, la main à la ministre française en charge de la Francophonie,
Yamina Benguigui. Banalités...
En réalité, la lecture médiatique de ce
sommet met les deux personnalités face à face, dans une espace de "bataille
silencieuse' où les gestes et les mots sont calculés pour comprendre à l'autre
"qu'on est d'accord qu'on est pas d'accord" pour que tout le monde le sache
bien.
Momo Soumah pour GuineeConakry.info
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