(Le
Pays 21/08/2012)
C’est le printemps des rébellions armées en République
démocratique du Congo (RDC). L’est du pays, déjà écumé par divers groupes dont
le plus important est le M23, doit désormais s’accommoder d’une nouvelle faction
dissidente. Joseph Kabila, le président congolais, n’est pas au bout de ses
peines.
Cet énième groupe armé est évidemment dirigé par un officier
supérieur dissident de l’armée régulière. C’est dire que le ver de l’instabilité
de la RDC est dans le fruit. L’on finit d’ailleurs par se demander si Kabila ne
dirige pas une armée mexicaine où l’on trouve de tout, des plus loyaux aux plus
félons. Sauf que, bien entendu, pour sa sécurité personnelle, il est prêt à y
mettre tous les moyens.
Les bases d’un véritable Etat démocratique ne
sont pas encore posées en RDC. Il y a d’abord cette armée républicaine qui tarde
à voir le jour. Le moindre désaccord se règle à coups de feu, d’où les
rébellions à n’en pas finir. Mais la crise en RDC n’est pas que militaire. Elle
est éminemment politique, à l’image du Mouvement militaire qui vient de naître
et dont la dénomination pourrait prêter à sourire : « Mouvement pour la
revendication de la vérité des urnes ». Entendez par là les résultats de la
présidentielle et des législatives de 2011. Le pays a donc très mal à sa
gouvernance. Le déficit de légitimité du président, ajouté à son refus
d’ouverture politique, n’est pas fait pour créer l’union sacrée. C’est donc
Kabila lui-même qui constitue un des problèmes du Congo, à l’instar de bien des
dirigeants africains. Son refus d’asseoir une véritable démocratie, dont le prix
pourrait être sa sortie de scène (par les urnes), maintient le pays dans une
permanente chienlit. Peut-être est-ce d’ailleurs une politique délibérée que
d’entretenir ce climat délétère, afin de mieux s’accrocher au pouvoir ? En tout
cas, on voit que malgré les critiques et les rébellions, Kabila ne change
pas.
Jusqu’à quand jouera-t-il ainsi les funambules, affublé de sa double
casquette de chef d’Etat et de chef de guerre ? Il espère sans doute avoir le
même bonheur que Idriss Déby du Tchad ou François Bozizé de Centrafrique, entre
autres, qui ont fini par triompher des rébellions qui les assaillaient. Mais
encore faut-il que Kabila fasse la paix avec ses voisins et que ces derniers
cessent d’avoir un regard envieux sur les richesses de la RDC. Incapable de
fédérer les Congolais autour d’une cause commune, Kabila a aussi du mal à
trouver un modus vivendi avec ses voisins, en particulier le Rwanda. Partant, il
perpétue l’occupation, par milices et groupes armés interposés, d’une bonne
partie du territoire congolais. Ici, les enjeux sont autant politiques
qu’économiques. Une RDC maintenue sous perfusion ne peut non seulement empêcher
le pillage de ses richesses, mais aussi ne lui permet d’occuper le rang qui
devrait être le sien : une puissance régionale, voire continentale. Tout compte
fait, on est tenté de croire que la situation de ni paix ni guerre arrange tout
le monde : les hommes d’affaires, les voisins du Congo, le pouvoir basé à
Kinshasa, les faiseurs de paix, etc. Seuls les démocrates et le peuple congolais
sont perdants dans ce jeu de dupes. Mais attention, à force de jouer avec le
feu, les multiples acteurs de la crise congolaise, à commencer par Joseph
Kabila, pourraient se brûler un jour le doigt.
Mahorou KANAZOE
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