(La Prospérité 14/08/2012)
Les auteurs du massacre de Gatumba courent encore les rues.
Ils n’ont jamais été inquiétés. Ni par la justice nationale, ni par la Cour
Pénale Internationale. Et, pourtant, ce jour-là, des morts avaient été comptés
en un nombre tellement impressionnant qu’il en appelait à une enquête rapide et
sérieuse. Azarias Ruberwa Manywa l’a si bien regretté hier, à Fatima, où une
messe a été organisée, en guise de commémoration de ce triste événement dont la
chronique avait été, en son temps, un sujet très repris dans les annales des
atrocités les plus déshumanisantes parmi les événements que l’histoire de la RD.
Congo ait connus, sous l’empire 1+4 né du dialogue entre congolais tenu à Sun
City, en Afrique du Sud. Ce lundi, en effet, Azarias Ruberwa, ex-Vice-Président
de la République, Président du Rassemblement Congolais pour la Démocratie et
Notable issu de la communauté Banyamulenge, est revenu, avec insistance, sur la
nécessité, pour la justice internationale de faire son travail, pour démanteler
les réseaux des criminels qui avaient, de manière inattendue et surprenante,
endeuillé le Congo-Kinshasa, sur le sol burundais. Il a également, à cette
occasion, déploré que Moreno O’Campo, le Procureur sortant de la Cour Pénale
Internationale, n’ait pas tenu ses promesses, en dépêchant, comme la communauté
Banyamulenge le souhaitait, une mission d’enquête. C’est pour cette raison qu’il
réitère, du reste, son espoir de voir Mme Fatou Bensouda, l’actuelle dame qui a
succédé à Moreno, à la tête de la CPI, de prendre ce dossier en mains, pour
identifier les coupables à la suite d’un procès équitable autour de cette
tragédie insolite. Au-delà de tout, Azarias Ruberwa estime que la tolérance et
l’acceptation mutuelle devraient normalement procéder de la volonté de tous les
peuples de bâtir un Congo nouveau, un Congo qui serait plus beau qu’avant,
conformément aux vœux des ancêtres consignés dans l’hymne national, depuis des
années d’indépendance, en juin 1960. A titre purement illustratif, Ruberwa, la
main au cœur, n’aurait pas aimé que la RD. Congo dont l’histoire est si riche en
enseignements douloureux, revive encore, après autant de péripéties, des temps
durs où la coexistence pacifique de ses communautés multiples, plus de quatre
cents, au total, endura un coup dû aux incompréhensions alors que le destin
solidaire imposait plutôt une attitude plus exigeante en termes d’harmonie, pour
sa survie en tant que nation mais surtout, en tant qu’Etat. Pour rafraichir la
mémoire de tous ceux qui étaient présents à cette cérémonie de commémoration, à
Notre Dame de Fatima, hier, en fin de la soirée, Ruberwa a rappelé, à juste
titre, l’expérience fort saumâtre du massacre des Kasaïens, au Katanga. Dans le
même registre, il a parlé du cas des violences au Bas-Congo, avec cette page
sombre engendrée à la suite du traitement réservé aux adeptes de Bundu dia
Kongo, à l’approche des élections pluralistes de 2006. Ruberwa n’a pas manqué,
en outre, de faire revivre à ses convives à cette cérémonie, le dossier des
affrontements des armées rwandaises et ougandaises opérés grâce à la complicité
de certains congolais insouciants, à Kisangani, dans la Province Orientale. A
son avis, les congolais devraient maintenant et plus que jamais, développer un
sentiment d’amour du prochain. Ceci serait d’ailleurs un motif de fierté, si les
congolais, en dépit de leurs origines, de leurs convictions politiques ou
religieuses, de leur appartenance ethnique, régionale ou tribale, considérer ces
différences comme une richesse plutôt qu’une sève du mal à laquelle, ils
s’accrocheraient, pour se déconnecter des réalités de la globalisation
économico-financière face aux défis du développement des nations éprises de
paix. Comment les américains plus nombreux et plus diversifiés, s’il faut
comptabiliser leurs souches d’origine, que les congolais et dont les Etats
s’étendent sur des territoires plus vastes que le Congo sont-ils devenus un
peuple fort, uni et prospère ? S’est interrogé Azarias Ruberwa, avant de se
faire compléter par Moïse Nyarugabo qui, lui, a rappelé la genèse du massacre de
Gatumba, dans la nuit d’un certain 13 août 2004. Sous la modération de Charles
Mukiza, d’autres Notables à l’instar de Benjamin Mukulungu, Député élu à
Shabunda et, du Vice-Président du cadre de concertation des Notabilités du
Sud-Kivu, sont intervenus, pour en appeler à leurs ressortissants à observer une
pensée pieuse en mémoire des victimes de ce massacre de Gatumba. L’occasion
faisant le larron, ils ont, à leur manière, lancé un appel à la fin des
hostilités concernant l’actuelle guerre qui sévit au Nord-Kivu, une guerre dont
les soubresauts auraient déjà une influence négative sur la vie des
Sud-Kivutiens. Dans cette édition, voici l’allocution de Moïse Nyarugabo qui, en
un mot comme en mille, résume les frustrations de la communauté Banyamulenge en
rapport avec cet odieux massacre de Gatumba. Allocution de Moïse Nyarugabo à
l’occasion de la commémoration du 8ème anniversaire du massacre de Gatumba
Honorables, Excellences, Distingués invités, Mmes et Mrs, La date du 13 août de
chaque année est devenue un rendez-vous où la Communauté Banyamulenge ensemble
avec d’autres compatriotes et différentes personnalités se retrouvent pour
commémorer les tristes évènements de Gatumba du 13 août 2004. Ce rendez-vous est
une occasion qui nous est offerte nous tous qui y avons répondu d’élever nos
voix pour dire NON et JAMAIS PLUS de tel massacre à l’endroit des Congolais,
quels que soient leur appartenance tribale, le lieu où ils vivent ou leurs
convictions. C’est pour cela que la Communauté Banyamulenge que vous avez
honorée ce jour se réjouit de votre présence qui est, certes, un signe de
solidarité et de consolation. Honorables, Excellences, Mmes et Mrs, Pour rappel,
des membres de la Communauté Banyamulenge, mais aussi des Communautés Bembe,
Fuliru et Barundi se sont réfugiés au Burundi fuyant des hostilités qui avaient
élu domicile en province du Sud-Kivu. Les autorités du pays d’accueil, le
BURUNDI, ont installé ces infortunés dans différents sites dont celui de
GATUMBA. Dans la nuit de 13 au 14 août 2004, un commando génocidaire composé,
selon les témoignages, des FNL Palipehutu, des Interhamwe et des Maï-Maï a fait
irruption dans le camp tuant à l’arme à feu et à l’arme blanche hommes, femmes
et enfants et brûlant leurs corps dans leurs abris de fortune. Exécutant leur
besogne de manière professionnelle, ces bourreaux ont procédé à la sélection des
leurs victimes jusqu’à atteindre un nombre de 152 morts et plusieurs milliers
des blessés de la Communauté Banyamulenge. 14 autres victimes étaient des
Babembe trouvés dans les mêmes tentes que les Banyamulenge. Par la suite, le FNL
PALIPEHUTU, groupe rebelle Burundais, a revendiqué ce massacre. Selon les
témoignages, les tueurs ont traversé nuitamment la rivière RUZIZI vers la RDC
après leur forfait. Des corps calcinés, comme vous l’avez vu dans ce film, ont
été inhumés en présence, notamment, du Président burundais, des représentants du
Gouvernement de la RDC, des représentants de la mission onusienne au Burundi
ainsi que du HCR. Notons également que ce genre de crime est un fait unique dans
l’histoire de la RDC. En effet, il n’est pas mentionné une situation similaire
où la population congolaise a été systématiquement massacrée en lieu de refuge.
Face à la cruauté de ces tueries et à leur caractère sélectif, toutes ces
personnalités ont haussé le ton pour condamner ces massacres. Elles ont rassuré
aux rescapés qui les suivaient de vive voix, de ne ménager aucun effort en vue
de la mise sur pied d’une commission internationale d’enquête dans le but
d’identifier les responsables et de les sanctionner. La détermination de ces
autorités avait suscité au sein de la Communauté Banyamulenge, victime des
massacres à répétition, l’espoir de voir cette question prise en charge par la
justice. Fort malheureusement, huit ans après ce massacre, il est regrettable de
constater que les attentes de la Communauté Banyamulenge en ce qui concerne la
justice sont loin d’être rencontrées. Ni la RDC, notre pays ; ni le Burundi, le
pays d’accueil ; encore moins la Communauté Internationale, responsable des
réfugiés n’osent rétablir la vérité de ce crime en vue de la sanctionner.
Pourtant, ces criminels dont certains ont revendiqué ce massacre ne nécessitent
pas de méthodes sophistiquées pour être démasqués et appréhendés. Il suffit
d’une volonté et d’une détermination. Honorables, Excellences, Mmes, Mrs. A coté
de 166 morts, il faut considérer les blessés, les orphelins, les veuves et veufs
qui sont devenus invalides ou traumatisés du fait de vivre ces évènements
directement cette nuit du 13 au 14 août 2004 à Gatumba. Ces hommes et femmes
sont, à ce jour, éparpillés et laissés pour compte. Leurs conditions sont
indescriptibles. Excellence, Honorable, Mme, Mr, Ce tableau sombre ne peut pas
offusquer les actes positifs posés par certains gouvernements et organisations
pour soulager tan bien que mal les rescapés de massacre de Gatumba. La
Communauté Banyamulenge les reconnaît à leur juste valeur. Néanmoins, par ce cri
qui sort de leurs cœurs et en cette commémoration, la Communauté Banyamulenge
demande 3 choses : 1. Identifier les auteurs de massacre de Gatumba et les
sanctionner. Nous demandons à la RDC de le faire ; Nous demandons au Burundi de
le faire ; Nous demandons à la Communauté Internationale de le faire. Mieux
encore, tous les 3 peuvent le faire en synergie. 2. S’occuper convenablement et
rapidement des questions de retour des réfugiés pour mettre un terme à leur
errance. A ce sujet, nous saluons les rencontres tripartites qui se tiennent
pour amorcer ce retour et souhaitons que le processus soit accéléré, en créant
des conditions favorables au retour. 3. Condamner et sanctionner les discours et
actes d’incitation à la haine et de violence tribales à l’instar des messages
distillés dans la presse dernièrement et des violences commises à Bukavu ce
samedi 11/08/2012. Il convient de noter que ces violences se sont faites sur la
seule base de faciès. A ce propos, nous saluons les quelques mesures prises par
les autorités allant dans ce sens et les encourageons à aller plus loin pour
décourager définitivement les activités et éradiquer ce genre d’actes. A travers
ces vœux, la Communauté Banyamulenge dit qu’elle est résolument engagée dans la
voie de la paix et de la réconciliation sans laquelle le développement ne
saurait être envisagé. Que le Tout Puissant garde notre pays et ses dirigeants,
qu’il garde notre peuple afin que la paix et la justice soient reconnues à tous
JE VOUS REMERCIE
La Pros.
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