vendredi 27 juillet 2012

Pour son soutien avéré au M23 : Kagame pris en étau


(Le Potentiel 27/07/2012)

Pour avoir violé le droit international en appuyant le M23, groupe rebelle qui sème l’insécurité dans l’Est de la RDC, le président rwandais s’est coupé de ses principaux partenaires. Les Etats-Unis lui ont coupé l’aide militaire avant de menacer de le traduire devant la CPI. Pour les mêmes raisons, les Pays-Bas ont suspendu leur aide au secteur de la justice au Rwanda estimée à 5 millions d’euros. Un peu timidement, la Grande-Bretagne menace aussi de couper le pont avec Kigali en attendant une contre-expertise du rapport de l’ONU. Bref, Paul Kagame se trouve pris en étau, à l’instar du libérien Charles Taylor.

Les réactions de la communauté internationale face au drame qui sévit en RDC sont annonciatrices de la fin du régime en place à Kigali.Réputé chouchou du monde occidental, particulièrement du réseau anglo-saxon, Paul Kagame ne serait plus en odeur de sainteté auprès de ses principaux partenaires. Le président rwandais pourrait dans les jours à venir tomber sous le coup d’un mandat de la Cour pénale internationale (CPI) relativement à son soutien militaire au groupe rebelle M23 entré en guerre contre les FARDC depuis avril dernier.

C’est le célèbre quotidien britannique ’’The Guardian’’ qui a livré l’information dans son édition du mercredi 25 juillet. Le journal rapporte que les Etats-Unis ont averti les dirigeants rwandais que la Cour pénale internationale (CPI) pourrait ouvrir un procès contre le président Paul Kagame et son entourage pour leur soutien aux rebelles accusés de crimes contre l'humanité en RDC.«Il existe une limite dans le droit international. Si vous la franchissez, vous risquez d'être traduit en justice pour le soutien apporté à un groupe, soutien qui permet à ce groupe de commettre des crimes», indique The Guardian, citant Stephen Rapp, ambassadeur itinérant chargé des crimes de guerre au Département d'Etat américain.

A l’allure où vont les choses, Paul Kagame serait en passe de subir le même sort que le Libérien Charles Taylor, condamné par la CPI à 50 ans de prison pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis par le RUF en Sierra-Leone. Ce groupe rebelle avait bénéficié de l’ancien président libérien dans la commission de ces crimes.

Le diplomate américain s’appuie sur les preuves irréfutables réunies par le rapport de la Monusco à l’encontre du président rwandais et de hauts cadres du régime de Kigali pour fonder sa démarche. Rappelons en passant que c’est le même département américain qui, en son temps, a aidé la CPI à poursuivre Charles Taylor, à le faire inculper et condamner.

Paul Kagamé et son entourage, notamment des généraux nommément cités par la Monusco, peuvent être accusés de complicité avec les membres du M23 (Mouvement du 23 mars) créé par le général rebelle Bosco Ntaganda, lequel est aujourd’hui le sous le coup de deux mandats de la CPI. Le premier pour les crimes commis en Ituri (Province Orientale), le deuxième pour ceux commis dans le Nord-Kivu. Il s’agit essentiellement de la circonscription des enfants dans des groupes armés.

Selon Stephen Rapp, l’initiative qu’entend mettre en œuvre les Etats-Unis marque un changement important dans l’attitude de Washington, qui s’est longtemps ancré sur l'inaction internationale en raison du génocide de 1994 ; argument maintes fois brandi par Kigali pour couvrir ses crimes dans l’Est de la RDC. Pour avoir déjà siégé à titre de procureur en chef au tribunal pénal international sur la Sierra-Leone, il estime que le soutien du Rwanda au M23 et d'autres groupes armés «doit cesser», car «il maintient l'anarchie» dans la partie Est de la RDC.

Les juges de la CPI ont déclaré Charles Taylor coupable d'avoir «aidé et encouragé» les rebelles du RUF de Sierra-Leone à commettre de terribles crimes pendant la guerre civile et d'avoir planifié avec eux trois attaques particulièrement meurtrières. Pourtant, «Charles Taylor n'a jamais mis ses pieds en Sierra-Leone, mais il a été reconnu coupable d’avoir aidé et encouragé les rebelles du Front révolutionnaire uni (RUF)», a indiqué à The Guardian le diplomate américain. Cette condamnation venait rappeler aux dirigeants africains qu’ils peuvent être tenus pénalement responsables des crimes commis à l’étranger par des rebelles ayant bénéficié de leur soutien.

A noter que cette menace américaine de poursuivre en justice Paul Kagame et ses valets succède à une autre mesure prise récemment aux termes de laquelle l’administration américaine suspendait son aide militaire à Kigali estimée à 200 mille dollars américains.

IT/L’étau se resserre autour de Kagame

L’avalanche des condamnations est tel que Paul Kagame se trouve pris en sandwich par ceux qui, naguère, le dorlotaient et le caressaient dans le sens du poil. La recette du génocide rwandais ne pouvant plus justifier tous les égarements et autres incursions militaires de Paul Kagame sur le territoire congolais.

En écho au gel de l’aide militaire imposé par les Etats-Unis, les Pays-Bas ont annoncé, à leur tour, la suspension de ladernière tranche de leur aide évaluée à 5 millions d’euros. C’est ce que rapporte le Financial Times qui cite un porte-parole du ministère néerlandais des Affaires étrangères. Selon le journal : «Les Pays-Bas ont décidé de suspendre leur aide budgétaire au Rwanda jusqu'à ce que ce dernier cesse de soutenir les rebelles dans la République démocratique du Congo». Le porte-parole a déclaré que les Pays-Bas, de concert avec des partenaires de l'UE, vont déterminer leur position sur l'aide au développement en faveur du Rwanda sur la base de la réaction officielle de ce dernier au rapport d'experts des Nations unies, de même que sur «l'évolution dans le domaine, y compris l'arrêt immédiat du soutien du Rwanda aux rebelles en RDC».

De mieux en mieux pour Kinshasa, qui voit le rapport de force entre lui et Kigali changer en sa faveur, un autre écho favorable estvenu de la Grande-Bretagne. Quoi qu’il lui soit encore difficile de rompre tout de suite avec son protégé, Londres a également menacé de franchir le Rubicon au cas où les accusations portées contre Paul Kagame dans le rapport de l’Onu seraient corroborées par une contre expertise. La Grande-Bretagne a indiqué jeudi qu'elle pourrait retirer son soutien au président Kagame s'il est prouvé que son gouvernement est en train de financer les rebelles en RDC.
«Si le Rwanda a violé les résolutions du Conseil de sécurité en brisant l'embargo sur les armes des Nations unies, nous aurons besoin d'évaluer notre position», a confié au Financial times le porte-parole du Foreign Office et du Commonwealth.

Même si Kigali continue à nier – mais en vain – son appui aux rebelles du M23, des preuves irréfutables réunies ça et là attestent clairement de son implication aux côtés du M23. Paul Kagame, dont le rôle dans la déstabilisation de la RDC n’est plus à démontrer l’a lui-même reconnu au cours d’une intervention dans le documentaire «La chute de Mobutu».

Par ailleurs, le rapport du Projet Mapping de l’ONU publié en 2010 a levé tout pan de voile dans l’implication de Kagame dans «les violations les plus graves des droits de l’Homme et du droit international humanitaire commises entre mars 1993 et juin 2003 sur le territoire de la RD Congo», l’ex-Zaïre. Depuis, le chef de l’Etat rwandais a mis en place un vaste réseau de crime dans l’Est de la RDC, finançant et entretenant des rébellions de tous genres.

Le conflit entre les deux pays plonge ses racines dans le génocide rwandais de 1994. Au moins 800 000 personnes ont alors été exterminées sur le territoire du Rwanda, poussant d’autres, comptés parmi les génocidaires, à trouver refuge en RDC.Toutefois, le génocide de plus 9 millions de Congolais tarde à être reconnu. Raison pour laquelle l’opinion congolaise souhaiterait que la mise en accusation de Paul Kagame puisse être une occasion de remonter jusqu’à la condamnation de vrais commanditaires de la tragédie au Congo. Cette condamnation devra être accompagnée d’une procédure de réparation en faveur de nombreuses victimes mais également pour l’environnement détruit à cause des affrontements armés.

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